Premier album du duo de Montpellier Dirty Bootz, Broken Toy (auto-production) mêle le blues, au rock, grunge et blue grass mais pas que, il y aurait un léger côté brut dans la musique de Dirty Bootz qui tendrait un peu vers le country folk….
Tous deux venu de l’Hérault, Geoffray Aznar officie aux guitares et à la voix, tandis que Samuel Devauchelle montre de quelles baguettes il se chauffe à la batterie et s’échauffe en choeur. Combinés et complémentaires, ils réussissent fort bien la surprise de faire croire en un groupe de plus de deux artistes, tant cela envoie, enchaine et s’envole dans de vifs riffs en fusées…..qui fusent et propulsent dans l’anglais type américain, l’Amérique du nord et sa gigantesque nature s’étant découverte d’est en ouest, avec des bottes il fut un temps.
Sur des sonorités qu’on pourrait prendre à s’y méprendre pour du Neil Young, Seasick Steve, un peu Nirvana ou Skip James, neuf morceaux entament une transhumance hurlante vers la conquête de l’ouest.
Partis à la conquête du public et des auditeurs qui en auront pour leur temps d’écoute, on assiste à la cavalcade à travers ces Etats-Unis, en fait devenus temples du consumérisme et de l’exploitation des biens et personnes bien loin du rêve américain et de l’idéal de liberté et de réussite de tous les possibles et envisageables.
L’arme noire en jouet cassé de la couverture rouge sang évoque bien la brutalité et la violence d’une telle épopée avec des bons, des brutes et des truands à tous les croisements.
Le timbre grave de Geoffray Aznar sur les tempos percussifs haletants de Samuel Devauchelle télétransportent dans des territoires d’imaginaire collectif où shérif, autochtones, hors-la-loi et cow-boys jouent au plus fort avec leurs armes et montures.
Chercheur d’oreilles, Geoffray Aznar a composé l’album en ressentant les effets de l’aride sud héraultais et du maquis balayé par les vents marins comme s’ils étaient ceux expérimentés au nord américain. La Camargue et ses paysages parsemés d’animaux sauvages ne sont après tout pas loin de Montpellier.
Le blues des débuts du rock et le grunge des années 90 semble avoir touché le duo qui s’en démarque à leur aise par l’ajout de bluegrass et de fuzz ça et là. Avec des fulgurances sonores indémodables.
‘’Bogeyman’s Grin’’ (le large sourire de l’épouvantail ou du croquemitaine) fait penser à ces étendues cultivées ou petits lopins de terre où pour se prémunir contre les prédateurs de récolte trône l’épouvantail dans l’espoir de faire fuir…..avec un large sourire. A la polysémie d’ouvrir les possibilités (soit épouvantail ou croquemitaine) selon les paroles de Geoffray Aznar et de Miguel Lopez dit Mill dans l’album.
‘’Burnt my Home’’, la maison brûlée, là la musique nous mettrais sur les traces visibles des promoteurs, prédateurs financiers ou autres brûleurs de bien immobilier, et quand bien même les nuages seraient à vendre autant qu’ils s’en mettent plein les poches, avec l’argent qui n’a pas d’odeur dans leur poches comme sentir le brûlé : « All your clouds for you to sell , And your / pockets down they have a smell »
‘’Dead Clouds in your Pockets (and sunshine down in mine)’’ est l’incarnation de l’esprit lucide et de la main optimiste en premier titre de l’album qui puise sa force dans des mots et incantation positives face à la rage exprimée dans cette voie. Le morceau ‘’End is a Start’’, la fin est un départ, conserve le même modus operandi avec guitares, voix et batterie en alchimie positive et bienfaisante tel le titre ‘’Never say Good Bye’’ dans lequel on n’a pas à dire aurevoir, jamais.
Le quatrième morceau ‘’Broken Toy’’ sonne comme un larsen négatif tant il suppose un accès de violence et de casse. Cependant ‘’When She Comes’’ ( »lorsqu’elle vient ») le négatif devient positif (‘she’ muse ou mort?) et ‘’Welcome to The Sun’’ reprend ce soleil bienfaisant, bienfaiteur, universel.qui admet l’entrée en lumière et repousse l’ombre d’où qu’elle vienne au sol.
La traversée effectuée dans l’album Broken Toy ne laisse pas le pessimisme l’emporter, même si les bottes portées sont sales, elles ne perdent pas leur fonction première de protéger le pied avec style et force, et l’arme cassée même en jouet signe la réussite du pacifique sur le guerrier, le port d’arme étant inscrit dans la Constitution américaine comme un droit mais pas un devoir.
Un album qui fait travailler, mène à une réflexion autant qu’une pérégrination musicale et exotique dans un monde pourtant si familier en western réactualisé, ce qui en fait un album incontournable qui sort le 31 janvier 2020.
https://www.facebook.com/dirty.bootz.mtp/
Van Memento Maury