LIZ CHERHAL, CHEVAL DE FEU

J’avais découvert Liz Cherhal sur scène pour son premier album Il est arrivé quelque chose en 2012. A suivi Les survivantes, et pendant le festival d’Avignon 2018, elle présentait son dernier album : L’alliance, sorti en mars 2018.

La voir sur scène, c’est la promesse qu’il se passera toujours autre chose que ce qui existe sur le disque. Elle a un univers bien à elle et se confronter avec la scène et le public, elle adore.

Enfant, on l’a laissé libre : “Faire de la musique ? On ne m’a pas forcée, on m’a proposé. J’ai commencé à faire de la guitare classique et du solfège et ça n’a jamais été un truc contraignant. Mes parents me disaient toujours : si tu as envie d’en faire, tu en fais et si tu en as marre, tu arrêtes. J’ai aussi  fait du roller et à 20 ans, je me suis mise à l’accordéon qui est devenu l’instrument que j’utilisais le plus en concert”.

C’est pendant la tournée du deuxième album Les survivantes que l’idée germe sur scène de mélanger les genres. Un concert qui associerait la langue des signes et le concert : “ça faisait déjà quelques années que j’apprenais la langue des signes; disons que dans ma famille, il y a du handicap (pas la surdité), donc c’est quelque chose qui me touche beaucoup et surtout l’exclusion que ça peut engendrer. J’ai toujours trouvé ça injuste de naître comme ça”.

Le troisième album L’alliance pourrait rejoindre le poème de Boris Vian avec son questionnement  Pourquoi que je vis ? Pour Liz, ça part toujours de quelque chose de réel, vécu ou d’un fait divers : ”Pour l’affaire Jacqueline Sauvage par exemple, j’ai passé beaucoup de temps dans une médiathèque, à lire des récits de femmes battues, ce qu’elles ressentaient…” Mais sa propre vie reste le moteur  principal de son écriture : “Il y a les mots, les histoires de  ma vie, les réparations, parce que je l’ai vécu, la culpabilité qu’on a quand on fait vivre à l’autre une rupture, et comment faire pour annoncer à l’autre que l’on va partir, comment on refait sa vie avec quelqu’un qui a des enfants, comment on embarque tout le monde là dedans”.

Il y a surtout le titre de l’album, L’alliance, qui symbolise quelque chose de fort « j’avais besoin d’un titre positif je voulais donner une image belle de tout ça ça me convenait bien. »

Si Liz compose seule – guitare/piano et voix avec une mélodie -, c’est Morvan Prat qui s’occupe des arrangements. Présent aussi sur scène pendant la tournée, lors de la phase d’enregistrement, il est beaucoup intervenu : ““Je lui transmets tout, parfois avec une idée d’arrangement, plus pêchu, plus trip hop, je le guide mais il me fait aussi des propositions. C’était important pour moi qu’il apparaisse en photo (même si c’est suggéré) sur la pochette de l’album ; ce disque a été pensé à deux”.

Après l’enregistrement, la phase de préparation du spectacle est arrivée, qui reprend des chansons des différents albums. Car quand  Liz a quelque chose dans la tête, rien ne lui résiste et c’est une travailleuse acharnée.

Dépasser ce qui a été fait, aller plus loin dans le travail visuel du concert. “Cette forme que je propose, je l’avais en tête depuis un moment mais je n’avais pas les capacités de le faire. Il a fallu que je me forme 5 ans pour la langue des signes et j’ai derrière moi 2 ans de danse. J’ai bossé, à Nantes, je me suis mise au boulot”.

Trouver des traducteurs en langue des signes a été la première étape. “On a bossé avec deux interprètes professionnelles, Vanessa Branchereau et Amélie Pietri, à qui j’ai transmis les textes de mes chansons. Elles ont adapté et transmis à Cyrille Gérard, comédien et traducteur en langue des signes.

photo de Pascal Pacquet

“On s’est retrouvés pendant 2 semaines pour monter le spectacle avec pour la proposition visuelle, Nery (ancien chanteur/musicien des Nonnes Troppo et des V.R.P – qui lui aussi avait écrit sur le thème du handicap à sa manière : Corinne…), et pour les lumières, Camille Modèle ».

Liz, est un cheval de bataille. Fougueuse et enthousiaste, naïve et fragile, elle construit avec son spectacle quelque chose d’unique. Cela lui semble naturel ; “C’est une langue qui devrait être parlée par tout le monde, j’ai envie d’apporter ma petite pierre à l’édifice”.

Même pour le merchandising, soucieuse de l’environnement, elle propose des gourdes pour remplacer les bouteilles plastiques…

Liz Cherhal, profondément généreuse, est à découvrir sur scène. Ne la manquez pas lorsqu’elle se produira près de chez vous.

“Pourquoi que je vis ?”

“Parce que c’est joli”.

Concerts à venir :

Concert L’alliance : 15 novembre au Théâtre Jean Marmignos à Saint Gaudens

En duo avec Morvan : 11 mai à L’espace Crouzy à Boisseuil