« Control Freak » de Shal Ngo. Le Roi des fourmis.

Le désavantage des plateformes, c’est d’avoir un choix démultiplié sans savoir à quel programme se vouer. Là, un titre alléchant, ici, une affiche savoureuse et parfois une star en plein milieu, histoire d’entériner votre décision. C’est sur ces bases, parfois prometteuses, souvent hasardeuses, que je me suis penché sur ce « Control Freak », long-métrage d’horreur qui promettait de l’épouvante… et des fourmis ! Après visionnage, qu’en reste-t-il ?
Pas grand-chose qui ne « cro-onde ».

 
Le soin apporté à la photographie de « Control Freak » est évident. Shal Ngo, réalisateur mystérieux issu du court-métrage et de la série TV, dirige son film avec efficacité mais, faute d’inspiration, plagie « Mister Babadook » de Jennifer Kent et pioche dans la poche de Cronenberg tout en lui apportant une touche plus « glamour ». Mélange audacieux pour un scénario lambda, ce dernier ne franchissant pas les portes du convenu et du déjà-vu. L’immense point faible de ce film est sa manière de distiller des informations et des mystères depuis longtemps éventés. Nous appréhendons, dès les trente premières minutes, ce qui se joue chez notre gourou. Bien entendu, confronter des colloques de « réhabilitation/estime de soi » donnés par une maîtresse de cérémonie hypocrite et un mal-être étrange se manifestant par des grattements compulsifs était une idée de départ judicieuse. Nous percevons, d’ailleurs, très bien l’héritage laissés par « Chromosom 3 » et « Black Swan » dans cette opposition « monstruosité organique » VS « show ultra maitrisé« . Thématiquement parlant, tout est parfaitement orchestré : le trauma familial, le désir d’enfant, le couple mixte, le poids du passé, pour déboucher sur un climax en plein show télévisuel.  Oui, le vernis craque…et nous aussi. Car il aurait fallu le talent d’un David Lynch ou d’un Guillermo Del Toro pour illustrer sauvagement cette descente aux enfers. Non, notre frileux Shal ne prend aucun risque. Ne déroule aucun twist. Les fourmis ? Un gadget. Nous cherchons encore le lien qui les raccorde à une entité maléfique. Bernard Rose peuplait son  » CandyMan  » d’abeilles prémonitoires avec une explication en préambule. Là, je reste coi.  La possession ? Quel rapport avec cet orifice dans la tête de notre protagoniste ? L’auto mutilation ? Gratuite. « Evil Dead » en ligne de mire, pour rien. C’est d’autant plus rageant que le budget engagé semble des plus confortables et la distribution impliquée dans cet horror-movie . A commencer par Kelly Marie Tran (à mille lieux de son rôle tenu dans « Star Wars 8 : les derniers Jedi« ) et Miles Robbins (vu dans la version 2018 d' »Halloween« ). Malheureusement, tout semble plaqué. Désincarné. Maladroit. Nous imaginions un cauchemar du niveau de « Black Phone » ou d’ « Insidious« . Nous restons sur notre faim via un épilogue absurde.
Pauvre Kelly Marie Tran, victime d’un « bashing » écœurant auprès de certain(e)s fans de « Star Wars » en 2017 (mais sont-ce vraiment des fans, ces  » haters  » lobotomisés ?) et tentant, tant bien que mal, de faire oublier sa prestation correcte au sein de la saga. Personnage de Rose mal dessiné ? Racisme dégueulasse ? Les raisons de la bêtise sont incalculables. Il n’empêche. Ne possédant ni la stature de Michelle Yeoh ni le bagou de Tom Cruise dans  » Magnolia « , notre sympathique actrice peine à convaincre. Les quelques scènes de sexe (comme autant de moments « adultes« ) qui saupoudrent « Control Freak « gênent, d’ailleurs, plus qu’elles ne valident une quelconque « maturité« . Miss Tran n’est pas la seule fautive. La voir se débattre dans cette série B vite écrite et vite torchée déçoit.   » Control Freak  » ? Pas vraiment chic. Il y a presque 20 ans de cela, William Friedkin renversait un public conquis par le truchement d’un « Bug » autrement plus poisseux et possédé. Laissons, donc, Shal Ngo gagner en style (d’écriture) et en assurance (de travelling). Et, pour patienter, replongeons-nous avec volupté dans « La Métamorphose » de Kafka, le brillant et dystrophique  » Phase 4 » de Saul Bass et ce titre de « Pearl Jam« , ô combien marquant, pour qui aime les petites bébêtes nichées sous la peau…
 
« All these
I got bugs, I got bugs in my room
Bugs in my bed, bugs in my ears
Their eggs in my head
Bugs in my pockets, bugs in my shoes
Bugs in the way I feel about you
Bugs on my window trying to get in
They don’t go nowhere, waiting, waiting
Bugs on my ceiling, crowded the floor
Standing, sitting, kneeling
A few block the door
And now the questions
Do I kill them?
Become their friend?
Do I eat them?
Raw or well done?
Do I trick them?
I don’t think they’re that dumb
Do I join them?
Looks like that’s the one
I got bugs on my skin,tickle my nausea
I let it happen again, they’re always takin’ over
I see they surround me, I see
See them deciding my fate
Oh, that which was once, was once up to me
Oh, it’s too late
I got bugs in my room, one on one
That’s when I had a chance
I’ll just stop now, I’ll become naked
And with the bug I’ll become one« 
 
Dites !
Cela vous gratouille ou cela vous chatouille ?…
 
John Book.