Après avoir enflammé les scènes d’Europe pendant plus de dix ans sous le nom d’Anatomie Bousculaire, Cécile et Alice reviennent avec un nouveau projet : The Bousculaires. Nouveau nom, nouvelle esthétique, mais même feu sacré. Leur premier album « Le Sourire de Véga », masterisé par le grand Alex Gopher, explose de rythmiques puissantes et de mélodies entêtantes — un disque pensé pour le corps autant que pour l’âme, pour les nuits sans fin, les transes collectives et les étreintes sincères. Dans la lignée d’artistes comme Kompromat ou Irène Drésel, The Bousculaires poursuivent leur chemin, libre et intense, avec une vision affirmée : faire danser, faire bouger les lignes, bousculer les codes.
Quoi de mieux pour en découvrir plus sur ce duo que de leur laisser la parole ? Elles nous en parlent avec sincérité.
Dix ans de tournées, 400 concerts, une métamorphose… Pourquoi ce changement de nom aujourd’hui, et que symbolise « The Bousculaires » par rapport à Anatomie Bousculaire ?
The Bousculaires, c’est une mutation. On a toujours su qu’un jour, on basculerait vers l’électro. Ce n’était pas une rupture, mais une évolution naturelle.
Anatomie Bousculaire, c’est notre groupe de rock, notre point de départ, nos racines. On y tient énormément, ce nom fait partie de nous, comme une deuxième peau.
Quand on a commencé ce nouveau projet, plus électronique, plus nocturne, il nous fallait un nom qui garde ce lien intime avec notre histoire, tout en marquant une nouvelle ère.
« The Bousculaires », c’est exactement ça. C’est un autre visage sonore de la même énergie.
The Bousculaires, c’est l’avatar Dirty Décadent Electro d’Anatomie Bousculaire.
Le Sourire de Véga est un album taillé pour la nuit, à la fois électro, punk et hypnotique. Quelle était votre intention en studio : faire danser, provoquer, ou peut-être tout ça à la fois ?
L’électro nous a offert un champ des possibles immense, presque infini.
Ce qu’on cherchait avant tout, c’était le lâcher-prise. En studio, on écoutait chaque track en se projetant : une Boiler Room à Berlin, une rave sauvage face à la mer…
Est-ce que ça donnait envie de danser ? Est-ce que ça nous filait des frissons ?
On voulait créer un son qui puisse faire communier une foule. Un exutoire. Une transe collective. Cette sensation rare de soulagement partagé, quand les corps vibrent à l’unisson.
Vous venez du Pulp, club mythique et bastion lesbien de la nuit parisienne.
En quoi cet héritage queer et nocturne continue-t-il de nourrir votre musique aujourd’hui ?
On y a passé des nuits entières. À danser, à se perdre, à s’émerveiller. C’était l’époque de l’émergence électro à Paris, et le Pulp en était l’épicentre. Une folie queer, joyeuse, radicale, libératrice qui nous a profondément transformées.
Ce n’était pas seulement une fête, c’était un espace de liberté politique, un lieu où les corps pouvaient s’exprimer loin des normes. Cette énergie de résistance, de dépassement, s’est imprimée en nous.
C’est devenu une part de notre ADN, aussi bien dans le rock que dans l’électro. Cette époque ne nous a jamais quittées. Elle continue de nous traverser, de nous inspirer, de nous rappeler que la musique et la nuit sont des actes de rébellion et de création.
La nuit, le son, la liberté des corps : tout ça, c’est nous. Et c’est ce souffle politique et vital qu’on a toujours essayé de défendre avec notre musique.
Vous citez des figures comme Rebeka Warrior, Maud Geffray ou Kompromat. Qu’est-ce qui vous inspire chez ces artistes, et comment vous vous situez par rapport à cette scène ?
On vient plus ou moins tous du même endroit, de la même époque. Celle du Pulp, de DJ Sex Toy, Jennifer Cardini, Chloé, Ivan Smagghe, Manu Le Malin, Rachid Taha… C’était une vraie effervescence, un moment où les artistes inventaient leur univers sans se poser de questions. Il y avait une liberté totale.
Rebeka Warrior, Maud Geffray, Kompromat… On ne les considère pas comme des influences au sens classique, mais plutôt comme des camarades de jeu. On a commencé à peu près au même moment, dans les mêmes endroits. On a grandi sur les mêmes scènes, les mêmes nuits, les mêmes excès. Il y a presque quelque chose de familial. Ce qui nous touche chez eux, c’est qu’ils n’ont jamais cherché à rentrer dans les cases. On se sent en phase avec cette logique-là.
Nos influences électro profondes vont de Vitalic, Laurent Garnier, Popof, Trentemøller, Moderat, Paul Kalkbrenner, Gesaffelstein, Faithless, Ben Klock, Worakls, Il est Vilaine, Rezz, Aaryon, jusqu’au Mozart de l’électro : Stephan Bodzin.
Et la liste de nos génies est évidemment bien plus longue.
Avec « Hors-Piste », vous sortez de la route, justement. Est-ce un manifeste pour revendiquer votre liberté artistique et refuser les formats ?
Pas seulement avec Hors-Piste ! (Ahahah)
Pour nous, l’art, c’est avant tout la liberté. D’ailleurs, dans notre album Le Sourire de Véga, plusieurs styles d’électro cohabitent. On fait ce qu’on ressent, sans jamais se poser de questions sur les formats ou les codes. À chaque fois qu’on a essayé de réduire une track, pas pour une question de format, mais pour gagner en efficacité, ça s’est transformé en vrai combat. Parce que chaque morceau a son propre développement, sa propre histoire.
Il doit suivre son chemin, jusqu’à ce qu’il nous satisfasse pleinement.
Vous avez sillonné l’Europe pendant une décennie. Qu’est-ce que la scène française vous apporte aujourd’hui, et qu’attendez-vous du public avec Le Sourire de Véga ?
La scène française indé a toujours été un vrai vivier. On a récemment pris une claque en découvrant Par.Sek sur scène, un groupe complètement à part, intense, inventif, avec un vrai sens du show. Ce qu’on attend du public, c’est simple : qu’il vienne faire la fête avec nous.
On cherche le moment où ça déraille, où la musique prend le dessus sur tout le reste. Les concerts, c’est un peu la quête du Graal, le moment où on redevient des sales gosses.
Notre vrai bonheur, c’est de partager cette transe collective qui dépasse la musique.
Avec Le Sourire de Véga, on espère provoquer cette émotion, un engagement, un moment suspendu de communion où tout redevient possible, dans la solidarité et le respect.