Magnifique performance de Nick Cave et Colin Greenwood, mais qui en doutait ?
Pas de ruée, pas de bousculade dans les aficionados pour obtenir la bonne place à la barrière. C’est configuration places assises et numérotées pour tout le monde pour cet événement organisé par le Festival Sœurs Jumelles. Sans surprise, l’ambiance sera studieuse.
Le cadre majestueux de la Corderie Royale de Rochefort et l’aspect quasi exclusif de ce rendez-vous lui donnent un goût particulier renforçant le sentiment d’intimité que Nick Cave désirait tant retrouver, en version piano-voix et accompagné pour cette tournée de Colin Greenwood, célèbre bassiste de Radiohead. Un casting sobre, mais de taille idéale pour en enthousiasmer plus d’un…
21 h 30, la fosse et les gradins ne sont pas encore complets que déjà Nick Cave et Colin Greenwood arrivent sur scène. Les applaudissements, à tout rompre, sont interrompus par l’Australien dans son très classique costume cravate noire et chemise blanche : » C’est la première fois que nous présentons ce spectacle en extérieur et en plein jour. «
Il poursuit en nous promettant d’écouter ce soir ces chansons dans une version unique, telles qu’il les composait avant l’enregistrement en studio :
» Nous avons décidé de vous interpréter les titres tels que je les présente à mon groupe avant qu’il ne s’en empare. C’est un peu comme si vous étiez en studio avec nous. «
Les derniers festivaliers prennent place, presque en silence. Les premières notes de « Girl In Amber » retentissent l’espace. Le ton est donné. Il sera solennel. Rappelons-nous que ce titre poignant avait été enregistré au moment de la disparition de son fils Arthur Cave en juillet 2015. « Higgs Boson Blues », « Jesus of the Moon » et » O Children » prennent la suite. Nous sommes .
Même si Colin ne semble n’être là que pour la forme, d’emblée il y a une immense douceur et belle complicité entre les deux artistes. Rapidement cette délicatesse nous captive, malheureusement confondue, par une partie du public, montrant des signes ostentatoires d’ennui tout au long du set. Ceux-là voulaient sûrement voir la bête de scène et pas un artiste en mal d’épure, comme il l’avait pourtant expliqué de façon plus qu’explicite dès le début.
J’admets que cette musicalité infiniment somptueuse dans un cadre aussi bucolique que celui-ci était perturbante par moments et méritait un espace peut-être plus feutré pour obtenir une attention et une écoute parfaites. Mais si il en avait été ainsi, sans aucun doute, la magie qui opérait là n’orait pas eu cette saveur.
Du haut du gradin, un peu loin, la visibilité d’ensemble était bonne et l’acoustique parfaite si je fais abstraction du va-et-vient entre quasiment chaque titre d’une minorité des spectateurs brisant ainsi l’écrin d’une écoute pourtant majoritairement religieuse à notre niveau. Voilà bien là le seul bémol des hauts gradins. L’Australien a pourtant plusieurs fois invectivé ces déambulateurs bruyants.
« Asseyez-vous et fermez votre gueule ! »
Les titres s’enchaînent, passant des sourires aux larmes, » I Need You « , » Joy « , » Mercy Seat » ou encore » Jubilee Street « , » Skeleton Tree « , » Push the Sky Away »… Malgré tout, la tension émotionnelle est forte, elle s’entrecoupe d’anecdotes et d’échanges épistolaires « I love you too » avec le premier rang. Le temps passe à une vitesse incroyable, sans même nous en apercevoir nous arrivons au rappel.
Après une brève sortie de scène pour la fin du show, les deux men in black invitent le public à investir le devant de la scène, sûrement pour augmenter encore un peu plus l’osmose qui lentement mais sûrement s’est installée pendant ces 2 h 20 définitivement uniques. Nous reprendrons en chœur en mode karaoké géant des titres de Leonard Cohen » Avalanche « , Young Charlatans » Shivers » ou encore T. Rex » Cosmic Dancer « , entrecoupés des standards des Bad Seeds « Nobody’s Baby Now », « He Wants You », « Sad Waters », avant de clore la soirée avec l’incontournable et toujours bouleversant « Into My Arms « .
Standing ovation. Nick Cave ému enlace Colin, puis échange quelques poignées de mains avec les plus fidèles, un ultime signe vers le ciel et il quitte la scène de Rochefort.
Le charisme de Nick Cave en band ou en quasi-solo est indéniable, effaçant au passage la présence d’un bassiste quasi légendaire… (Mais il n’était là que comme accompagnateur après tout).
Merci Messieurs, Merci festival Sœurs Jumelles pour cette soirée mémorable.
Stéphane Perraux









