[Interview] Mathieu Ramage “Chansons Joyeuses”

L’artiste rennais, Mathieu Ramage, auteur, compositeur, interprète et avant tout, amoureux des mots, sera en concert pour le lancement de la campagne de financement participatif de son premier album “Chansons Joyeuses”  le 21 avril au Théâtre du vieux Saint-Étienne. Pour cette occasion, nous avions discuté avec lui pour qu’il nous parle de son parcours et de son nouveau projet.

Pour commencer, peux-tu présenter ton parcours ?
L’écriture a été ma première passion. J’ai commencé par le slam, la poésie déclamée. De fil en aiguille, j’ai commencé avec mes textes à bosser avec des musiciens, et rapidement créé un premier groupe qui s’appelait les Ours Insensés, puis un second qui s’appelait Silence. Ensuite, j’ai eu l’occasion d’entrer dans la compagnie Fatras qui fait du spectacle de scène et maintenant du spectacle de rue. J’ai aussi fait un peu de musique irlandaise, je jouais du bodhrán. J’ai oublié de dire que je suis batteur de formation. Suite à la Covid, avec le confinement, ne pouvant pas bosser avec les copains, je me suis mis à travailler tout seul, et de là est venue l’idée d’un projet solo. Après un premier spectacle nommé « Jamais tranquille », un second appelé « Chansons Joyeuses », j’ai regroupé les deux dans un gros spectacle pour lequel j’ai gardé le premier nom « Jamais Tranquille », qui est un spectacle tiré au sort : à chaque prestation, je vais tirer au sort le spectacle que je vais jouer. En parallèle, j’enregistre mon premier album avec IDO Spectacles, qui va s’appeler « Chansons Joyeuses ». Pour défendre cet album sur scène j’avais envie de grossir l’équipe, je trouvais ça un peu difficile de le faire uniquement piano/voix vu que l’album a été enregistré avec d’autres instruments, d’autres musiciens. Donc j’ai monté une formule à 4 pour défendre cet album, avec une première qui a été faite à la Cité en septembre dernier et bientôt au Vieux Saint Etienne.

 

Donc ce qui t’as lancé dans l’écriture solo, c’est le confinement ?
J’ai toujours composé piano/voix, mais je n’ai jamais osé le piano, j’ai toujours eu un complexe vis-à-vis de cet instrument. Puis, comme je jouais tout seul, j’ai commencé à bosser tous les jours, j’ai monté un spectacle : je me rappelle que je commençais à 13h pile-poil pour être sûr de le faire, c’était ma routine ! Pendant le confinement, en plus, ça faisait du bien d’avoir une sorte de rigueur de travail. On ne pouvait pas faire de concert, on ne pouvait pas répéter. De là, je me suis dit que je ferais bien un spectacle pour 6 personnes, parce qu’ils nous disaient pendant le confinement qu’on ne pouvait pas être plus de 6 personnes dans un même lieu. Puis ce spectacle a pu se jouer devant 20, 30, 50 personnes, et ça a pris au fur et à mesure. Maintenant l’objectif de ce projet solo est de pouvoir le jouer en salle.

 

Maintenant tu as une vraie équipe qui bosse avec toi ?
Oui j’ai une vraie équipe. IDO Productions qui m’accompagne sur le développement du projet, et surtout sur l’enregistrement de l’album. Je bosse avec Niko qui a aussi arrangé l’album. Je commence bientôt à travailler avec un ingé-lumieres . Et j’ai eu l’accompagnement de Nils Gautier de la compagnie 3ème acte, qui fait la mise en scène sur mon spectacle.

 

Tu as pu monter ce projet avec plusieurs résidences successives ?
Il y a eu pas mal de boulot chez moi en amont. Et puis j’ai eu deux résidences à Orgères, puis à Pacé pour finir la mise en scène. Maintenant le spectacle est prêt. La prochaine aventure, c’est le spectacle à 4 où la vraie première sera le 21 avril au théâtre du Vieux St-Etienne. Le projet est déjà plus abouti et représente un vrai challenge !

 

En parlant de challenge, revenir sur un projet autour de ton écriture, ce n’est pas toujours compliqué pour se remettre en condition, travailler avec les autres ?
À partir du moment où je faisais un projet solo, qui portait mon nom, ça ne me posait pas vraiment de problème. Mais depuis que je bosse à 4, sous mon nom, là ça me fait un peu plus bizarre. Le fait que ce soit mon nom, ça me donne un peu plus de pression, dans le sens où les autres sont là pour servir mon projet. Parfois le travail d’artiste, surtout quand on est lead, au niveau de l’ego, c’est un peu compliqué à gérer (rires) ! J’essaie de faire preuve d’humilité dans cet univers de la musique, parce que je trouve que c’est important ! Enfin c’est juste un pli à prendre, ça devient le nom d’un projet, j’arrive à dissocier mon nom d’artiste de celui du projet.

 

L’univers est très important en tant qu’artiste lorsque l’on veut défendre un projet. Comment définirais-tu ton univers en quelques mots ?
Tout d’abord mon univers est un univers de mots. Parce que c’est mon premier média : mes chansons ont beaucoup de mots, elles sont assez verbeuses, j’ai des slams aussi, des textes sans musique. Ensuite, je dis souvent que ça alterne entre 3 tendances : quelque chose d’assez introspectif, quelque chose de militant, et pour alléger tout ça, de l’humour. Et beaucoup de légèreté  pour pouvoir trouver des angles intéressants qui ne sont pas trop frontaux et réussir à y mettre tous mes mots : tristes, heureux, difficiles ou plus faciles.

 

Un certain engagement, avec de la désinvolture ?
Je ne sais pas si c’est de la désinvolture. Je dirais plutôt un travail philosophique : des questionnements de société, des questionnements personnels, des questionnements sur la vie d’artiste, sur l’engagement. Mon premier spectacle parle vraiment de la transparence de l’auteur, pourquoi je l’ai écrit, quelle était la vision, comment aborder une chanson ou un texte. Le second parle plutôt d’une transparence de société, de l’aveuglement : en ce moment on est en plein dedans ! On est dans une époque charnière, dans un monde qui ne tourne pas forcément très rond, avec cette difficulté qui est d’ouvrir les yeux dans ce monde qui part un peu à vau-l’eau. Donc mon univers, c’est vraiment les mots et la transparence des mots, tout le sens, tout le poids qu’ils ont pour amener à une réflexion, sans essayer d’en éviter ni en mettre trop : c’est ça qui peut être difficile.

 

La justesse du propos est importante aussi ?
Oui, l’angle d’attaque. Quand on est trop frontal pour un texte engagé on peut vite être effrayant ou  moralisateur ! Par l’humour, j’arrive à y apporter une certaine légèreté qui fait que ça passe mieux. Mais ce sont des choses que j’ai apprises avec le temps. Avec mon premier groupe Silence, j’étais beaucoup plus frontal ! C’était un groupe plus rock, donc ça nécessitait plus ce style peut-être. Il y avait des gens qui adoraient, car ce sont des gens qui avaient besoin que ce soit frontal. Il fallait transposer ces émotions avec un vecteur un peu plus doux, plus léger. L’humour, je n’avais jamais fait ça avant, je n’étais pas du tout un artiste humoristique! Les premières fois où j’ai fait des choses destinées à faire rire, je me suis fait rire moi-même ! Donc je me suis dit que si je me faisais rire, alors que j’ai un humour assez particulier, il n’y avait pas de raison que ça ne fasse pas rire quelques autres ! Au fur et à mesure des spectacles, ça a pris et je me suis rendu compte qu’à certains moments, mon angle d’attaque était celui-ci : apporter un peu de légèreté et de rigoler de sujets qui ne sont pas forcément très rigolos.

 

J’ai eu la chance d’assister à ton spectacle à la salle de la Cité. Il a aussi un côté assez festif, quelque chose de très joyeux !
En écrivant un morceau comme « Les marionnettes », qui parle de marionnettes qui remontent leurs fils pour arriver au banquet des 1%, vous savez ces fameux 1% a qui tout appartient, je voyais quelque chose d’un peu festif, donc j’avais envie de quelque chose qui puisse donner un peu la patate. C’est la différence qu’il va y avoir par rapport à la formule solo. Avec la formule solo tu as vraiment un spectacle musical, on est vraiment dans l’univers d’un spectacle, on a un public assis, qui est à l’écoute. Mais sur la formule à 4, je vois ça plutôt comme un concert-spectacle, on met d’abord en avant la formule concert, avec un peu d’énergie, il faut faire un peu bouger ! Après je n’ai pas envie que ce soit l’unique dynamique, mais je trouve que c’est important d’avoir ce vecteur un peu festif, ça fait, en quelque sorte, partie du cahier des charges.

 

Tu vas bientôt lancer une campagne participative pour la création de ton 1er album. Tu as déjà pas mal travaillé sur celui-ci : comment penses-tu faire se rencontrer tes différents univers sur un seul album ? Car un album c’est avant tout de la musique qu’on écoute, mais tu as un jeu assez théâtral, très gestuel.
C’est ça qui était compliqué ! Quand on a un spectacle musical, il faut avoir un point de vue global. C’est difficile juste sur un clip, sur un morceau, ou même un teaser. Pour l’album, j’ai choisi ce qu’il y a de plus musical et de l’orcherstrer avec un directeur artistique qui s’appelle Niko Chatalain. Il a pris les morceaux piano/voix et les a réarrangés avec batterie, basse, guitare et synthé. Ce qui fait que l’on a toujours la même voix, toujours les mêmes instruments, mais l’univers est totalement différent. La voix est le liant de cet album, et mes textes aussi, qui sont reconnaissables je pense. On  n’a pas oublié le côté spectacle, donc on y a mis quelques délires, par exemple une chanson très courte, des textes presque à nus et aussi des chansons / délire pour pouvoir justement coller avec cet univers du spectacle qui me défini, tout en gardant de la cohérence. Ça reste un piano/voix, mais comme je vais dans plein de styles différents, ça m’influence, il y aura plein d’autres choses, on n’est pas sur un style particulier, même si ça reste de la chanson française. La cohérence se fera sur l’enchaînement des morceaux, et leur choix : j’avais 24 morceaux, on en a gardé 11. On a dû faire des choix, et ça n’a pas été facile, mais je pense qu’on a trouvé à faire quelque chose d’assez cohérent. Il y a beaucoup d’univers différents mais chaque univers trouve son écho quelque part : il y a forcément 2 chansons qui sont un peu dans la même veine.

 

Tu vas jouer au Vieux Saint Etienne, qui est quand même un lieu assez particulier. Ça te fait quoi d’imaginer ton spectacle dans ce lieu ?
Plein d’émotions ! Parce que c’est un lieu où je venais voir des spectacles avec mes parents quand j’étais petit. J’ai déjà eu la chance d’y jouer avec Fatras. Mais c’est un lieu où j’allais enfant, j’y ai vu de supers projets, donc savoir que je vais y jouer c’est pour moi hyper classe ! C’est un super lieu de spectacle, pas vraiment une salle de concert, et justement nous on est entre les deux ! En plus c’est magnifique, dans une ancienne église ! On va avoir le temps de préparer le spectacle car on est en résidence 2 jours avant pour pouvoir vraiment le fignoler. Et puis on a la chance d’avoir Hélène Le Gros en première partie, qui, je le sais, va savoir mettre l’ambiance qu’il faut ! Là j’ai juste envie d’y être, et ça fait partie des choses sur mon parcours que je n’oublierai jamais !

 

 


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Retranscription : Anma Leraud
Photo de couv. (c) Céline SALIOU