[Interview] Julien – Last Train

Dans le cadre du Festival Mythos 2025 à Rennes, j’ai rencontré Julien Peultier, guitariste du groupe Last Train. Au fil d’une conversation sincère et à la cool, il revient sur l’histoire du groupe, née d’une amitié solide, façonnée par plus de 500 concerts, des kilomètres avalés années après années, et cette passion toujours intacte pour la scène et la création.
Julien nous parle de l’évolution musicale de Last Train, des choix artistiques assumés, du plaisir toujours présent de jouer ensemble, mais aussi de cette envie constante de se renouveler, de se mettre en danger et de partir à la conquête de nouveaux publics, notamment à l’international.
Cette interview révèle la force d’un collectif soudé, animé par une curiosité artistique insatiable, et la volonté de rester fidèle à ses valeurs, loin des artifices.

 

 

Last Train groupe existe depuis un moment maintenant. Avec le recul, quel regard tu portes sur le chemin parcouru ? Qu’est-ce qui te marque le plus ?
Julien : Oh là là… C’est vraiment une longue histoire. Une histoire d’amitié, je crois que c’est ça, le plus important. Ce qui me vient quand je pense à l’ensemble, c’est qu’on est toujours potes, qu’on a grandi ensemble, vécu plein de trucs, des bons comme des mauvais.
Tu vois, tout à l’heure, en off, je te disais qu’on était venus en tourbus. Ça, pour nous, c’est fou. Avoir une équipe avec nous, du matos monté par des techniciens… On a galéré comme tout le monde, mais aujourd’hui on a une petite notoriété. On a fait plus de 550 concerts, alors forcément, nous avons de la reconnaissance, et une forme de gratitude.


Le fait que tout soit parti d’une amitié, ça renforce vos liens au fil du temps ?
Julien : Bien sûr. Un jour, dans notre bio, il y avait cette phrase : « Nous ne sommes pas frères, nous le sommes devenus ». Et c’est vraiment ça. On a vécu des trucs durs, de la fatigue extrême, mais aussi les meilleurs moments de nos vies.
Jean-Noël disait récemment : « On a passé plus de temps à se connaître que sans se connaître ». On se connaît depuis qu’on a 11 ans. Maintenant, j’en ai 29. Donc ouais, on est frères. Et ça, c’est notre vraie force.

Musicalement, vous avez aussi beaucoup évolué depuis vos débuts, tout en gardant une forte identité. Comment s’est fait ce cheminement ?
Julien : Il y a eu une période où on s’est cherchés. Un vrai tournant, c’est Fire en 2014. Ce morceau-là nous a montré ce qu’on aimait faire : des grosses dynamiques, des ruptures, des silences… Et ça a super bien marché en live.
Avant ça, nos compos, c’était presque des hommages : on avait littéralement des morceaux à la Sum 41 ou à la Muse. Mais avec Fire, on a commencé à trouver notre son.
Après, on a toujours essayé d’innover sans se répéter. Des fois, on s’est dit : « Attention, on frôle l’auto-caricature ». Par exemple, This Is Me Trying est très Last Train, mais en même temps c’est une montée post-rock qu’on n’avait jamais osé.
On a aussi laissé tomber certains morceaux en studio, parce qu’on se disait : « Là, c’est trop Queen of the Stone Age ». On veut faire ce qu’on aime, mais sans copier.


Donc le plaisir est toujours un moteur ?
Julien : Toujours. On a hâte de ce qui vient. Et même si on est hyper indépendants, qu’on planifie tout nous-mêmes sur plusieurs années, ça nous excite.
C’est vertigineux parfois, mais on sait ce qui nous attend. Cette perspective, elle nous porte.


Vous partez à l’international bientôt. C’est aussi une manière de retrouver cette adrénaline du début ?
Julien : Carrément. Là-bas, on repart de zéro. On sait qu’on va revenir au van, à monter le matos nous-mêmes. Mais c’est aussi ce qui nous garde humbles. Rien n’est acquis.
En France, on est bien accueillis, mais on ne veut pas se reposer sur nos acquis. C’est pour ça qu’on sort aussi de notre confort.

 
Vous avez aussi créé un festival, des structures… Comment vous gérez l’équilibre entre tous ces projets ?
Julien : C’est pas évident, mais on fait des choix. Le festival, on en a fait deux éditions, puis on a arrêté. On ne voulait pas que ça devienne une contrainte.
Pareil pour Cold fame, la boîte de prod que Jean-Noël gérait. Il a tout arrêté pour se consacrer au groupe. Moi aussi, j’ai arrêté à un moment donné.
Mais à côté, moi je fais de la vidéo, des clips, des docs… Et ça me nourrit. J’ai besoin de ça. Si je faisais que Last Train, je m’ennuierais presque.

 
Si tu devais choisir entre musique et image ?
Julien : (Rires) Je peux pas répondre à ça… Mais bon, si vraiment je devais, je choisirais Last Train. C’est mon histoire, c’est mes potes.
Mais dans dix ans ? Je sais pas. On n’en parle pas trop entre nous, mais on commence à se dire que peut-être, un jour, il faudra tourner la page.
On a un peu peur d’être les vieux rockeurs qui s’accrochent. Alors qu’un vieux réal’, c’est stylé ! (Rires)

 
Vous avez toujours eu cette envie de ne pas vous installer, de ne pas devenir « trop gros ». En 2019, vous étiez passés au Penny Lane, à Rennes, pour les Bars en Trans, dans un format ultra intimiste…
Julien : Ah ouais, le Penny Lane avec Bandit Bandit, T/O et Modern Men 5024, c’était fou. C’était important pour nous de garder cette énergie. On ne veut pas devenir des artistes qui prennent la grosse tête, qui perdent pieds. On a toujours eu peur de ça, donc parfois on se remet volontairement dans des conditions roots.
Rejouer dans des mini-salles, faire les balances nous-mêmes… ça nous reconnecte à l’essentiel. Et puis ça rend les grandes scènes encore plus savoureuses.
Quand on revient de concerts devant 100 personnes à Londres et qu’on joue devant 1000 en France, on se dit : « OK, on a de la chance. »

https://www.lasttrain.fr/

Photo de couv. Stéphane Perraux