BEST OF THE BEST BY JACQUES COGNON (Benefactor X)

Il est souvent difficile de choisir, mais encore plus quand, il t’est demandé de sélectionner tes 5 albums favoris et que tu as une vie de musique à ton actif. Mission impossible. J’ai cependant tenu à relever le défi lancé par Stéphane, même si je le sais, à part certaines constantes, ma liste risque d’être modifiée si l’on me demande à nouveau de l’établir dans quelques temps. Ma sélection est bien évidemment toute subjective, chaque album correspond à un repère dans ma vie, et j’ai opéré un choix sur le postulat que les albums sélectionnés s’écoutent encore aujourd’hui sans se dire: ” oh putain, ça a vieilli quand même!”

 

1968.

Année houleuse en France, j’ai 8 ans j’habite Toulouse et je participe à mes premières manifestations (en cachette de mes parents et avec la complicité de ma tante). C’est aussi l’année de sortie d’un album qui va (je ne le sais pas encore) me marquer pour toute ma vie. Cet album c’est le double blanc des Beatles. Pour le môme que je suis, cet objet est magique. C’est la caverne d’Ali baba. 30 morceaux, tous aussi différents les uns que les autres; un tourbillon sonore, un kaléidoscope des sens. Du rock, des ballades, du psyche, du hard rock, de la folie, de la pop. C’est tendre, c’est âpre, c’est hargneux, c’est doux, c’est fou. Y a tout et plus que tout. Je ne reviendrai pas sur les conditions d’enregistrement par le groupe, tout le monde connaît l’histoire. Pour l’instant, je suis subjugué, et je le suis encore aujourd’hui. Il n’y a rien à jeter. Des Fab Four au sommet de leur art? Je ne sais pas, je crois qu’ils n’ont jamais quitté les sommets. Et ce packaging!!!! une pochette immaculée avec le numéro d’édition en surimpression, le poster photos sur le recto, les paroles des chansons sur le verso. Petit plus me concernant, j’ai pu acquérir un pressage original à l’époque, pour un prix très élevé à l’époque (40 francs). Je n’ai jamais regretté cet achat.

 

1969.

Changement d’ambiance, changement de lieu. Nous avons déménagé à Perpignan. Je me suis fait de nouveaux copains. Avec l’un d’eux nous nous trouvons des affinités musicales (rencontrer son homologue côté musique lorsqu’ on a 10 ans, c’est pas banal et ça crée des affinités). Il a un grand frère et deux grandes sœurs qui sont “anticonformistes” comme on dit à l’époque. En fait, ils sont hippies en rébellion contre leurs parents et la société. De ce fait, leurs chambres sont des mines d’or pour nous qui, dès qu’ils ont le dos tourné, nous en profitons pour fouiller dans leur discothèque. Et c’est ainsi qu’un après midi d’hiver, dans la chambre du grand frère, je tombe sur un disque dont la pochette est tout à la fois, effrayante, surprenante, dérangeante et totalement hors norme. Pas de photos du groupe, non. à la place, un visage en gros plan qui crie, de douleur, de frayeur, je ne sais pas. je suis fasciné. Nous mettons, mon pote et moi, immédiatement la rondelle noire sur la platine. Et là c’est le choc. Ça démarre tout doux, silencieusement, quand tout à coup, surgit un déferlement de son. L’urgence, la vie après l’apocalypse. 21st century schizoid man. Une grenade a explosé dans la chambre. mon copain et moi sommes scotchés. Bravant le danger de se faire découvrir par le grand frère, nous écoutons l’album entier. Mais quelle découverte! Aucune des plages ne sonnent comme ce que l’on a l’habitude d’entendre. Bien évidemment, dès que je le pourrai, j’achèterai ce in the court of the crimson king by King Crimson. Je me suis fait piquer mon exemplaire original dans les années 80. Je m’en suis procuré un nouveau. Ce disque, je l’écoute encore régulièrement aujourd’hui, il me fascine toujours autant.

 

1977


No Elvis, Beatles, or The Rolling Stones in 1977. Autre époque. Changement de style. Le mouvement punk m’a trouvé. Une attitude qui colle parfaitement à ma personnalité. J’ai démarré en 76. J’étais le seul punk de ma ville. J’étais l’attraction de mon bahut. L’année d’avant (75) j’avais des cheveux longs, j’écoutais Yes et Genesis. C’est fini. j’ai les cheveux coupés à l’emporte pièces, j’écoute Dr Feelgood, Eddie & the hot rods et les sex pistols. Je suis à l’affût de toutes ces nouveautés en écoutant les radios anglaises sur la bande AM. J’entends de plus en plus parler de ce groupe, The Clash. Ils ont joué avec les sex pistols. Aussi c’est tout naturellement que je me précipite chez mon disquaire préféré en ce mois d’avril pour acquérir et découvrir le premier opus de ce groupe. Et quelle claque! c’est un brûlot, un manifeste. Le groupe fait défiler en chansons tout le mal être et le cynisme d’une génération qui ne croit plus en son futur. Le bonus sera ce reggae blanc brulé à vif dans la reprise de Police and thieves qu’interprète le groupe. Les sujets traités dans les chansons, sont, malheureusement, toujours d’actualité. 3 ans plus tard, j’achèterai le LP publié pour le marché américain et qui comprend une version de I fought the law et white man in Hammersmith Palais. Cet album m’accompagne très régulièrement encore aujourd’hui.

 

1979


Banlieue de Londres 1977, cinéma désaffecté, un groupe livre un set étonnant devant un maigre public d’une 50e de personnes. Que des anglais et des amis du groupe, sauf 2 frenchies égarés, arrivés là presque par hasard. Après le set, le groupe étant venu rejoindre ses amis, les 2 frenchies vont saluer le chanteur guitariste et lui dire tout le bien qu’ils ont pensé de la prestation. Ils repartiront avec l’adresse du gars griffonnée de sa main sur un bout de papier. Initialement, la petite amie du frenchie avait demandé un autographe. Robert a préféré écrire son adresse. Début juin 79, les deux frenchies sont de nouveau à Londres. Comme à son habitude, le frenchie que je suis, passe la quasi-totalité de ses journées dans les bacs des disquaires. J’en ressors le Three Imaginary Boys de The Cure, tout juste sorti du pressage. “C’est quoi cette musique de gros?” me dira mon frère lorsqu’il entendra les premières notes de l’album. Depuis ce premier album de Cure ne me quitte plus et a été un nombre incalculable de fois la bande son de mes jours.

 

1979 (encore) 


Juin toujours, je suis à Londres. J’achète au Virgin de Piccadilly Circus cet album à la pochette caractéristique; toute noire avec les ondes d’un pulsar, en blanc. Cet album va marquer toute une génération de 10 ans ma cadette. Avant que les “petits” ne se l’approprient, pour l’instant en cette année 79, il marque le tournant dans la musique rock. Les 10 titres qui le composent sont des explosions neurasthéniques, une violence retenue, à la recherche d’oxygène pour éviter l’asphyxie. On ne sort pas indemne de l’écoute de cet album, qui est aujourd’hui encore une référence. C’est ça l’intemporalité. Petite anecdote, bien des années plus tard, je devrais jouer avec mon groupe dans la maison de Mani, le bassiste des Stone roses. Dans le public devait y être un certain Bobbie Gillespie, et Peter Hook qui se rendent en Espagne. Un contretemps fera qu’ils ne s’arrêteront pas dans la région à l’aller. On prendra juste l’apéro ensemble lorsqu’ils en reviendront.

 

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