Il y a chez Mike Polizze cette étrange lumière de fin d’après-midi, ce crépuscule tendre où chaque note semble tomber comme une feuille hésitante. Déjà remarqué pour son virage folk sur « Long Lost Solace Find » (2020), l’ancien trublion psyché de Purling Hiss continue d’explorer une veine plus douce et contemplative avec ce deuxième album solo, « Around Sound ». Une œuvre cousue main, patinée par le temps, enregistrée à petits pas et à cœur ouvert.
Si le précédent disque portait encore les traces d’un isolement contraint, celui-ci s’en échappe comme on entrouvre une fenêtre un matin de pluie : avec lenteur, pudeur, mais aussi un sentiment profond de libération. Around Sound s’écoute comme un journal intime griffonné sur un carnet humide, entre le rustique et le rêveur. Mike y joue de tout : guitares en arpèges délicats, batterie discrète, piano en soupirs, jusqu’au mellotron et vibraphone qui tissent un fond d’air presque spectral. Et pourtant, jamais l’ensemble ne sonne comme un bricolage en solitaire : la magie du coproducteur Jeff Zeigler opère, donnant à chaque morceau la sensation d’un groupe invisible jouant ensemble dans une pièce feutrée.
À travers des morceaux en clair-obscur, Polizze creuse le sillon d’un folk habité, qui convoque les esprits de Bert Jansch, Steve Gunn, Wizz Jones, voire un Kurt Vile débranché et introspectif. Ironie douce-amère : si l’album est une lettre d’amour à la guitare électrique anglaise, celle-ci est totalement absente du disque. Tout ici est acoustique, organique, et pourtant terriblement vibrant.
Il y a des chansons qui trottent, d’autres qui flânent, certaines s’attardent près du feu pendant que d’autres filent au coin d’un bois. On sourit à l’humour léger d’un riff, on s’égare dans une ligne de basse comme on suivrait un ruisseau. Et parfois, on se fait surprendre par une mélodie qui reste collée au cœur. L’album est moins solaire que son aîné, plus « pluvieux », comme si les nuages avaient apporté avec eux un supplément d’âme.
Around Sound n’est pas là pour séduire à la première écoute, mais pour s’installer doucement, durablement. Un disque de l’après, un disque du « entre-deux », de ceux qui réconfortent sans faire de bruit. Et Mike Polizze s’impose, sans fanfare, comme l’un des plus fins artisans de cette folk intime qui sent la terre mouillée et les vieux vinyles.