“Spider-Man: l’histoire d’une vie” par Chip Zdarsky et Mark Bagley. “One Day in your Life…”

Je vous avais déjà vanté, il y a quelques mois, les nouvelles aventures du célèbre justicier masqué via l’excellente BD “Symbiote Spider-Man. Fondu au Noir” de Peter David et Greg Land.
Un retour en très grande forme- qui raviva ma flamme de fan- doublé d’un plaisir “vintage” adressé à tous les quinquagénaires en mal de galipettes gravitationnelles.
Décembre 2020. Le Père Noël est sur tous les fronts et inonde les magasins ainsi que le cœur des enfants. Un bonheur n’arrivant jamais seul, c’est avec la plus grande joie que je fais la découverte d’un comic’s résumant en un “one shot” la vie tumultueuse du monte-en-l’air. Sans tomber dans l’évocation pompeuse ou l’encyclopédie scolaire, Chip Zdarsky (scénariste de “Daredevil” & “Marvel 2 in One”) et Mark Bagley (dessinateur de “Venom” & “All New X-Men”) jouent habilement avec la chronologie du protagoniste tout en convoquant l’Histoire des Etats-Unis. Et nous voyons, pour la première fois, Peter Parker traverser les décennies sur fond de troubles (une Amérique fragilisée face à la guerre et aux attentats, des ennemis insatiables, une paternité ratée, des Guerres Secrètes interminables, etc.…) et accuser les affres du temps ! Contre toute attente, notre scientifique devra revêtir à de nombreuses reprises et à un âge avancé son habit iconique, quitte à en payer le prix.

Tout a déjà été dit et pourtant…
Quelle maestria ! Le scénario brille par l’intelligence de son propos, sa psychologie fouillée et le dessin (parfois un tantinet 90’s) mise tout sur l’expression de ses personnages. Mille-feuilles digeste, cette rétrospective aligne les bornes quotidiennes d’une figure populaire avec aisance et sans redondance. Ainsi, les évènements marquants-mondiaux ou non- s’enchainent et se calent sans le moindre accroc dans cette existence vouée à l’altruisme forcené.
Face A, les classiques :
La première morsure d’un arachnide irradié. Le mariage de Tante May (avec Docteur Octopus !) puis son décès. La création d’une multinationale. Sa coopération avec Red Richards et son implication dans la “Civil War”. Le Bouffon Vert. Le Super Bouffon. Venom. Et cette “Saga du Clone” n’ayant jamais trouvé d’intérêt (cette fichue manie de créer des doubles maléfiques, y compris dans le très beau “Logan” de James Mangold) à mes yeux.
Face B, les morceaux cachés :
Jouer les filles de l’air dans la lutte contre le Viêt-Nam quand Captain America prend fait et cause pour le Peuple Asiatique. Louper l’accouchement de Mary-Jane. Porter l’amour- fantôme pour Gwen Stacy comme un fardeau. Posséder une Maitresse. Délaisser ses enfants. Tuer le père de son meilleur Ami. N’avoir pas pressenti le 11 Septembre.
Vieillir. Mentir. S’enfuir.
Rien ne sera épargner à notre acrobate en collants. Ni les moments de bravoure, ni les actes manqués.

Peter Parker est un loser magnifique. Ses amours s’embourbent dans l’oubli et la désillusion. Sauver le Monde ? Sans problème.
Mais de réussite familiale ? Point du tout. Fiasco total.
“Un grand pouvoir implique de grandes responsabilités”…
Effet miroir. “Spidey”, “Nova”, “Strange”, “Special Strange”, “Titans”. 1978. 1984. 1990. Nous retrouvons les souvenirs de notre adolescence par l’entremise d’intitulés comme autant de pages tournées.

Spidey est notre voisin de palier. The “Boy Next Door”. Celui qui sauve Manhattan des flammes mais sort ses poubelles le dimanche soir. Ses doutes et ses interrogations sont les nôtres.
Mieux, il aurait pu figurer sur la “Track List” du dernier album de Bruce Springsteen tant ses doutes et ses échecs font échos à nos destinées contrariées.
Working class Hero, certes, mais premier de la classe.

Spider-Man est un rocker qui tient la scène jusqu’au bout. Costume d’apparat et corps offert à un public transgénérationnel.
Ses paroles universelles habitent New York.
Dans la Big Apple, les t-shirts de ce Lou Reed funambule pullulent.
Et Chip Zdarsky et Mark Bagley sont ses plus grands fans.
Vous enragez de ne plus vous faire une toile ?
N’hésitez plus!
Avec cette œuvre-phare, l’homme-araignée gagne définitivement ses galons de super- héros ordinaire et nous aide à patienter jusqu’à ce “Spider-Man Homesick” prévu pour…Décembre 2021!

John Book.