“Pistol” de Danny Boyle. Les indiens dans la ville.

Nous avions laissé Danny Boyle sur les berges du remake inavoué (“Jean Philippe” de Laurent Tuel et “Yesterday”, même concept, mêmes plans, même combat ?) sans retrouver le frisson éprouvé face à son cultissime “Trainspotting”. Non, Mr Boyle ne semblait pas ressentir le besoin de renouer avec la fièvre de ses œuvres de jeunesse, engoncé dans des budgets confortables et un cahier des charges proéminent made in Universal.

A moins que sa filmographie versatile ne soit, tout simplement, le reflet d’un cinéaste inégal, capable du pire (” Une vie moins ordinaire”, “La plage” ou “T2”) comme du meilleur (“28 jours plus tard”) ?
A l’annonce d’une mini-série sur la genèse des “Sex Pistols”, qu’attendre, donc, du réalisateur britannique ?
That is the question.
Disons-le tout net, “Fucking Danny”, pardon, “Buck Danny” retrouve la hargne et la malice qui le caractérisait début 90’s et dresse un doigt vengeur à toutes les séries ectoplasmiques qui peuplent nos plateformes. C’est avec une énergie débordante que cet éternel jeune homme empoigne le biopic d’un groupe cultissime comme un ultime pied de nez à ses détracteurs. Vous le pensiez dépassé ou “has been” ? Inspiré comme jamais, ce dernier casse ses jouets pour mieux les reconstruire. Ici, la musique (excellente) télescope sans ménagement des mouvements de caméra audacieux. Là, les concerts “live” sonnent comme des documentaires animaliers. Ça gueule, vous dévore puis vous régurgite. Puis, soudainement, Danny Boyle calme le jeu et se rêve Ken Loach. Au détour de dialogues bien sentis et d’une reconstitution historique inspirée, il ausculte, avec panache, une société au bord de l’implosion. Constat ? Le Swinging London est un lointain souvenir, l’avenir incertain et les rues peuplées d’iroquois sans emploi.
No future ?
Dans ce marasme social, les Sex Pistols seront la réponse braillarde à une indifférence monarchique polie.
Pour illustrer au mieux ces personnages en quête d’hauteur, le casting est au diapason : Toby Wallace a des faux airs de Jeffrey Lee Pierce, Anson Boon promène sa dégaine de marionnette aux fils coupés avec un je-m’en-foutisme jouissif, Louis Partridge nous saisit par sa bestialité scénique et Sydney Chandler campe, avec grâce, une Chrissie Hynde pleine de bon sens. Enfin, ce quatuor dévastateur ne serait rien sans son diabolique mentor et Thomas Brodie-Sangster lui donne chair avec une truculence “so british”, offrant à cette collection de vignettes une patine d’excellence.
Alors, que vous soyez plutôt versé dans le romantisme noir ou la déglingue à gogo, hâtez-vous de voir cette saillie foutrement rock n’roll !
 
Les Sex Pistols, punks à chier ? Non. Punks à chiens. Tendance “I Wanna be your Dog”.
 
John Book.