Lenteur planante et fascination lumineuse dans une forme de méditation enivrante. « Mirages II », deuxième collaboration entre Jean-Benoît Dunckel (moitié du duo AIR) et le compositeur Jonathan Fitoussi, est une œuvre atmosphérique qui invite autant à la contemplation d’un espace-temps spatial qu’à une rêverie sensuelle classieuse en lévitation. Sorti le 7 mars 2025, ce disque prolonge l’exploration sonore amorcée avec « Mirages » en 2019 et en affine la signature esthétique remarquable.
En huit titres, les deux compositeurs façonnent une matière musicale à la fois aérienne et terrestre. Les nappes synthétiques s’y déploient avec une élégance discrète, toujours au service d’un champ musical minimaliste lumineux. L’influence de la scène kosmische allemande des années 70 y est palpable, notamment dans l’usage des boucles répétitives et des motifs séquentiels chers à Cluster ou Tangerine Dream. Pourtant, Mirages II ne se contente pas d’un hommage rétrofuturiste : il s’ancre dans une modernité texturée, flirtant parfois avec les pulsations techno de Detroit, tout en conservant une sensibilité presque organique.
Iris, le titre d’ouverture donne le ton : mélodies éthérées, rythmes métronomiques et ambiance de clair-obscur. Ghost Town plonge l’auditeur dans une brume sonore où chaque son semble suspendu entre deux mondes. Karakoum et Atlantica élargissent le spectre, mêlant horizons désertiques et visions aquatiques dans une narration instrumentale sans paroles, mais non sans propos. Le duo ne cherche pas l’effet, encore moins l’éclat facile : tout ici repose sur la suggestion, la nuance, le détail, pour faire naître cette petite étincelle.
Enregistré au Studio Atlas à Paris, avec Michael Tainturier à la prise de son et au mixage, l’album bénéficie également du savoir-faire d’Alex Gopher pour le mastering, avec une finesse sonore irréprochable. La pochette, signée Xavier Veilhan, représentant une silhouette aérienne, abstraite et épurée, qui ajoute une touche arty à l’ensemble, dans un prolongement esthétique sobre et conceptuelle.
Mirages II exige une écoute attentive, presque contemplative, mais pour qui accepte de s’y plonger, il offre une belle parenthèse enchantée : un voyage introspectif fantomatique, porté par une électronique apaisée et profondément humaine. À l’heure où l’agitation algorithmique semble tout emporter, Dunckel et Fitoussi rappellent, avec élégance, que l’écoute et la contemplation ont encore droit au chapitre.