LES MARQUIS S’ADONNENT AU PLAISIR DE MYTHOS

L’édition 2019 du Festival urbain rennais, une fois de plus affichait une programmation de grands noms de la musique parmi lesquels Miossec, Bertrand Belin, Sanseverino, Bertrand Burgalat, Pete Doherty, Stephan Eicher, Denez Prigent, Jeanne Added,…
Mais il y a un nom qui résonne bien différemment des autres à nos oreilles de mélomanes !

« Le mythe à Mythos » selon Maël Le Goff, le président du festival .

Marquis de Sade, le groupe rennais qui aura marqué à jamais de son empreinte magistrale la scène musicale des années 80 en seulement deux albums d’une fulgurance inégalée : « Dantzig Twist » (1979) et « Rue de Siam » (1981).

L’annonce de la réformation du groupe le 16 septembre 2017 au Liberté à Rennes, pour une date annoncée unique, avait déjà provoqué un émoi de taille. Cela semblait surréaliste d’imaginer pouvoir voir ou revoir (pour ceux qui avaient pu les voir sur scène dans leur jeunesse).
Deuxième émoi lorsqu’on nous apprend qu’un album du live de cette date verrait le jour afin d’immortaliser dignement le retour du phœnix de la Cold wave française.
Troisième émoi enfin avec l’annonce ,quelques jours après la 1ère date de réformation, d’une tournée avec plusieurs dates à travers la France.
Que d’émois !


Et voilà qu’à présent, les deux enfants des Marquis vont voir leur famille s’agrandir d’un troisième rejeton. Le nouvel album tant désiré est officiellement sur les rails et devrait voir le jour à l’horizon 2020.
Qui a dit que la fertilité était liée à l’âge ?

Les amoureux des « jeunes gens mödernes » sont réunis sous le chapiteau du Cabaret  Botanique du Thabor à Rennes. Religieusement mais bruyamment malgré tout, pour assister au dernier concert du groupe avant leur départ pour les États-Unis où ils ont décidé d’enregistrer.

Les Marquis nous apparaissent fringants et souriants. L’envie d’être là transpire sur leurs visages, transfigurés de voir un public aussi nombreux les acclamer, certains par leur prénom! (Il y a ici de vieilles amitiés).
Philippe Pascal, Frank Darcel, Thierry Alexandre, Eric Morinière, Daniel Paboeuf, Xavier Geronimi et Paul Dechaume, entament la nuit par le très approprié Set in Motion Memories, suivi directement par leur « hymne » Henry. L’ambiance est déjà chaleureuse, presque fraternelle. Ils nous déroulent sur un tapis aussi rouge que le chapiteau, leur fameuse cold wave sombre qui nous touche toujours aussi profondément. Les titres s’enchaînent…  Who Said Why, Final Fog, Boys Boys, Smiles, Rue de Siam, Nacht Und Nebel, Silent World, Conrad Veidt,Wanda, etc…
Sans oublier la sublime reprise de Ocean du Velvet Underground.

Fantaisie scénique de Philippe Pascal lors de l’interprétation de « Air tight cell« , allant jusqu’à escalader la structure de la scène du Cabaret Botanique. Moment surréaliste… Le chanteur charismatique déclarant à la fin du morceau : « le groupe a tellement d’amour pour vous les gars, c’est incroyable que vous nous suiviez encore »…

Mais notre amour est aussi réciproque, ne le savez-vous donc pas !

Leur plaisir n’est plus a démontrer, ils ne l’ont même peut-être jamais eu autant accroché au ventre !!!

A l’âge classique de la prime jeunesse, les volontés sont sans limite. Toutefois, ce qui n’était pas possible hier ne resterait-il pas toujours faisable aujourd’hui?
Les créations des plus grands, devenus des maîtres par leur art, nous l’ont prouvé de nombreuses fois à travers les époques.
A l’âge qu’on appelle « Sagesse », le mythe et la réalité, qualifiés autrefois de fantasme, ne s’opposent plus fatalement. L’un et l’autre peuvent trouver un nouveau territoire d’existence.
Enfoui dans un écrin étanche, le désir de faire transcende toutes choses si tant est qu’il trouve écho et redevient perméable au temps qui est le notre.

Que nous vaut le privilège de leur présence à nouveau ? Chez L4L, nous pourrions dire sans erreur ni exagération, un rattachement à une lignée considérable de musiciens que leur confère leur illustre passé. Il sont les pères héroïques d’un son qui n’existait pas et qui, par leur renaissance miraculeuse, à l’épreuve des jours, entre dans une Mythologie au nom érotique.

Date après date, les Marquis apprennent à se reconnaître dans ce qu’ils avaient construit des années auparavant. Il est de notoriété que, même au sein d’une fratrie séparée durant des années, seul le temps permet de recréer les liens du passé.

« L’oeuvre ignore le jugement du temps pour prendre corps et âme. »

La vie de Marquis de Sade se poursuit et la nôtre à ses côtés.

Laissons le dernier mot au Marquis de Sade (celui de La Philosophie dans le boudoir) : « Il est préférable d’affronter une fois dans sa vie un danger que l’on craint que de vivre dans le soin éternel de l’éviter. »

PS: Un big up à deux hommes de l’ombre sans qui cette nouvelle aventure n’aurait pas lieu ; Dominic Sonic et Patrice Poch

Stef’Arzak