Bobbie, jeune chanteuse, guitariste et compositrice, profondément influencée par la folk country américaine, a débuté sa carrière en s’inspirant de figures emblématiques telles que Bob Dylan, Dolly Parton et Joni Mitchell pour développer un univers musical rappelant la folk des années 70. Elle mêle avec justesse compositions mélancoliques et chant d’une puissance bouleversante. Avec son élégant premier album, « The Sacred in the Ordinary », elle affirme son âme de country woman et on y découvre une sensibilité viscérale qui vous prend à bras-le-corps et vous serre le cœur jusqu’au frisson. En décembre 2024, elle participait au festival Bars en Trans à Rennes, l’occasion pour moi d’échanger avec elle sur son parcours et son univers.
Est-ce que tu peux présenter brièvement ton projet ?
Je suis autrice-compositrice, chanteuse, guitariste, plutôt de folk à la base. Maintenant, je catégoriserais plus ma musique d’americana. Ça évolue de plus en plus.
C’est un mélange entre de la country, de la soul aussi. Mais toujours avec de la folk.
J’ai l’impression que c’est un peu ces trois univers-là qui se mélangent. Du coup, je qualifierais ça de musique americana, donc inspirée des Etats-Unis, des musiques traditionnelles américaines.
Qu’est-ce qui t’a menée vers cette esthétique musicale ?
Je pense que c’est comme plein de choses qui se recoupent, mais ça s’est construit progressivement, presque involontairement. J’ai grandi autour des vinyles de mon père. Il y avait beaucoup de blues et de jazz. A l’adolescence j’ai découvert la folk à travers Bob Dylan et Joni Mitchell, qui sont deux artistes les plus importants pour moi. C’est là que j’ai commencé à écrire mes morceaux. Ensuite je me suis de plus en plus retrouvée dans la musique country. Ce sont des goûts et des univers qui se mélangent bien je trouve.
Aujourd’hui donc c’est une sorte de mix de tout ça qui fait ma musique, mon esthétique…
Ce sont aussi des styles musicaux très communicatifs, qui parlent à beaucoup de gens, il me semble ?
Je trouve que c’est un style très mélodique. D’ailleurs, la musique folk, ça veut dire la musique des gens. A Nashville, ils disent : « Three chords and the truth ». Trois accords et la vérité. J’adore ce concept.
C’est quelque chose de très brut, qui va à l’essentiel.
Tu mélanges ça avec ton esprit et tes textes. Il y a quelque chose de très personnel dans ce que tu chantes dans tes chansons. Ça te vient d’où les chansons que tu écris ?
Pour l’instant, c’est que mon premier album donc oui c’est très autobiographique pour l’instant. Peut-être que ça va évoluer sur le prochain album. Mais j’ai l’impression que si je veux être authentique dans ce que j’exprime, j’ai besoin d’avoir vécu l’émotion, le sentiment ou l’histoire pour réussir à le transmettre de la façon la plus vraie possible.
Mais c’est très universel, ce que je chante : les relations amoureuses, l’accomplissement personnel, les relations familiales. C’est très cartésien.
C’est aussi la sensibilité de la personne que l’on ressent ?
Oui, c’est vrai. Je suis quelqu’un profondément mélancolique et relativement nostalgique. Comme tous les artistes qui me plaisent en réalité. Je sens leur sensibilité, dans ce qu’ils écrivent.
Et je sais que c’est comme ça que je m’exprime le mieux musicalement. Dès que je crée une chanson, c’est d’abord parce que j’avais besoin de travailler une émotion, de la sortir. J’ai parfois l’impression que c’est très égoïste, parce que c’est mon processus pour aller mieux.
Mais après, lorsque je le chante, je le donne aux gens, et je me dis que ça peut aussi aider les autres à guérir.
On dit souvent que pour être bien avec les autres, il faut être bien avec soi-même. Il faut savoir soigner son moi intérieur. Partager ses faiblesses, c’est aussi une force, non ?
C’est vrai. Je pense qu’il y a un truc général de montrer qu’on est vulnérable parce que ça montre qu’on est juste un humain, qu’on a des failles, des faiblesses. La musique peut devenir un espace où on a le droit de se dévoiler. Et essayer de le transcender en le mettant en musique !
Peut-être que bientôt, j’écrirai des morceaux où j’arriverais à prendre beaucoup plus de distance vis-à-vis de moi.
D’accord, on en reparlera dans 20 ans alors ?
Je serai peut-être en train de faire de la dance-musique (rire).
Alors, on a parlé beaucoup de toi, de ce qui t’a mené là. Mais avec qui tu travailles, avec qui tu composes ?
Depuis longtemps, j’ai un producteur qui me suit indépendamment, qui est aussi ingénieur du son, qui s’appelle Sébastien Goyer. On est devenus même un duo, parce que c’est vrai qu’il m’aide à créer, à travailler les démos ensemble, la réalisation de l’album, la direction artistique.
Sur le son, évidemment, il a fait un travail incroyable. Et après, pour la partie écriture, c’est vrai que pour l’instant, c’était quelque chose que je faisais seul, de façon instinctive. Ce qui va peut-être un peu évoluer pour la suite.
Créer un peu plus dans un cadre. Je dis souvent que ça vient d’en haut, où on a l’impression que ça tombe du ciel. Mais peut-être que ça peut arriver autrement.
Sur scène, vous êtes en duo ?
De base, j’ai commencé seule. Maintenant je joue souvent en duo mais je joue aussi en solo et aussi en groupe. Je vais jouer à l’Alhambra en avril, avec tout mon groupe justement.
Donc ça dépend vraiment des formats.
Dans quelle configuration te sens-tu plus à l’aise ?
C’est un peu le tout-ou-rien. Il y a un truc qui est très puissant, finalement, quand on est seul. Parce qu’on a aussi une forme de liberté, dans le chant, dans le jeu, il y a un truc un peu plus instinctif, en fonction du public aussi. Et sinon, j’adore jouer en groupe parce que dans cette configuration il y a une énergie folle et la rythmique des autres instruments amènent une harmonie et puissance incroyable. On découvre différemment les morceaux. C’est vraiment génial en full band.
D’accord. Alors, on parle justement de la scène aujourd’hui. Donc, tu es programmée dans le cadre des Bars en trans. Qu’est-ce que ça te fait d’être programmée à ce Festival ?
Je ne saurais pas dire. Heureuse, forcément. Je ne savais pas que c’était autant reconnu, les Bars en Trans. C’est un super festival. J’avoue ne pas en avoir eu conscience avant.
J’espère aussi que ça va amener des opportunités et de la lumière sur ce genre de musique en France. Parce que pour l’instant, ce n’est pas forcément le style le plus mis en avant dans le monde de la musique. Je suis heureuse d’être là.
Pour revenir à ton rapport avec la scène. Qu’est-ce que ça te fait quand tu joues ?
C’est toujours une espèce de choc. Un choc violent d’adrénaline.
J’ai le trac, mais bien moins qu’avant. C’est à la fois très émouvant, parce qu’on se sent chanceux d’être là, sur scène pour partager une petite part de soi, et en même temps, c’est galvanisant. Ça rend un peu euphorique aussi. Il y a quelque chose comme ça.
C’est une musique assez posée que je propose alors il y a quelque chose de magique. Je suis quelqu’un de tellement sensible que je peux pleurer très facilement sur scène. Je suis parfois tellement transportée par ce que je vis à l’instant T. Ça m’est déjà arrivé plein de fois.
C’est toujours un exercice un peu périlleux pour moi.
Il y a cette forme de transmission avec le public. Tu sens parfois l’écho émotionnel des gens ?
Oui, mais c’est surtout après les concerts. Il y a eu plein de fois des gens qui sont venus me voir pour me dire qu’il avait pleuré en écoutant un morceau et que ça leur a vraiment parlé. Il y a même une fois, quelqu’un qui m’a dit :”Après avoir écouté ton morceau, j’ai quitté la personne avec qui j’étais”. Là, je suis quand même désolée d’avoir provoqué une rupture mais évidemment, ça me touche beaucoup. C’est toujours hyper émouvant quand les gens viennent à la fin pour dire ce genre de choses.
Ça donne du sens à ce que l’on fait ?
Je le vis moi-même en tant que spectatrice quand je vois des artistes que j’aime en concert. On a tout ça je pense. Quand on ressent quelque chose qui nous bouleverse, ça nous connecte à nous-mêmes et à nos vies. Mais oui ça fait plaisir quand on sens cette résonance avec les autres.
Admettons, dans quelques années, on te propose de jouer sur une scène n’importe où, laquelle choisirais-tu?
Mon rêve. Mais il est absolu, il n’est pas en France.
Ce serait au Ryman Auditorium à Nashville. C’est vraiment une salle magnifique qui a accueilli toutes les grandes stars de folk et de country. Ça, ce serait mon grand rêve.
Et après, il y a l’ Union Chapel à Londres. C’est une espèce de chapelle immense avec des vitraux partout.
Et puis, évidemment, en France, une salle mythique comme l’Olympia ou le Trianon. Déjà ce serait incroyable. Pour le prochain album peut être…
– BOBBIE sera en concert le 13/03/2025 // La Nouvelle Vague – St Malo