Stuck in the Sound, c’est plus de vingt ans de rock indépendant porté par une énergie brute, une exigence musicale constante et une identité sonore unique. Formé à Paris au début des années 2000, le groupe s’est rapidement imposé grâce à des titres puissants comme « Toy Boy » ou « Let’s Go », et une scène qui leur a permis de gagner un public fidèle, en France comme à l’international. Entre introspection, rage contenue et mélodies accrocheuses, Stuck in the Sound continue de se réinventer sans jamais trahir son ADN.
Avec leur dernier album, « 16 Dreams a Minute », sorti début 2024, le groupe explore une facette plus rêveuse et cinématographique de son univers. Sans renier ses guitares nerveuses, Stuck y injecte plus de textures électroniques, des ambiances plus atmosphériques, et une écriture plus introspective. L’album sonne comme un voyage intérieur, porté par une production léchée et une volonté claire : repousser les limites de leur style sans perdre leur intensité.
Depuis la création de votre groupe, vous avez parcouru un sacré chemin. Quels sont les moments marquants que vous aimez vous remémorer, ceux qui vous font encore rire ou qui restent gravés comme des temps forts ?
Il y en a beaucoup ! Les premiers festivals ont été très marquants. En 2006, quand notre premier album est sorti, on a vraiment commencé à se faire connaître au niveau national. On jouait dans des festivals mythiques où on allait avant en tant que spectateurs : les Eurockéennes de Belfort, Rock en Seine, les Vieilles Charrues… C’était un rêve.
Il y a aussi eu notre morceau Toy Boy sur le jeu Guitar Hero, ça nous a bien marqué. Et puis, le succès du clip de Let’s Go, qu’on a vu exploser sur YouTube avec des millions de vues… C’est fou. On ne s’attendait pas à ce que notre musique circule autant dans le monde entier.
Même nos débuts à Paris étaient magiques. Le rock n’était pas à la mode, on faisait un peu ça pour nous, sans trop y croire. Puis soudain, il y a eu un vrai intérêt, des concerts, des articles… C’était inespéré.
Et récemment, on a coché une autre case de rêve : jouer en Amérique latine. Pendant des années, on voyait des streams depuis le Mexique, la Colombie… Et cette année, on est allés trois fois là-bas. Jouer pour un public qui nous attendait, c’était incroyable.
Justement, le Mexique, c’était un peu virtuel jusque-là. Qu’est-ce que vous avez ressenti en arrivant sur place ?
On ne savait pas à quoi s’attendre. Et en fait, c’était une claque. Ce sont des jeunes, 18-20 ans, qui connaissent tout par cœur, qui chantent, qui dansent, qui pleurent. Il y a une énergie énorme, comme dans un stade, mais aussi une vraie sensibilité. Ils vivent chaque chanson à fond.
On les a rencontrés aussi en backstage, grâce aux meet and greets, un concept pas très français : les fans paient pour passer trois minutes avec les artistes. Ça finit souvent en longues discussions, en larmes, avec des histoires personnelles très fortes. On s’est rendu compte à quel point notre musique faisait partie de leur vie.
Vous avez évoqué une certaine résonance avec la culture mexicaine. Est-ce que ça vous parle aussi en termes de valeurs, d’identité ?
Oui, il y a une vraie cohérence entre ce que le public mexicain est, et ce qu’on fait. On a une musique assez engagée, héroïque, pleine d’espoir mais aussi de mélancolie. Et puis, on ne fait pas de la musique juste pour s’amuser. Il y a un fond, un propos.
On a toujours mêlé émotion personnelle et énergie plus collective. Nos morceaux parlent parfois de révolte, d’écologie… Ce n’est pas forcément purement politique, mais il y a une conscience. Et on sent que ce message trouve un écho très fort là-bas.
En France aussi, vous avez su garder une base fidèle tout en attirant un nouveau public. Est-ce que cette longévité vous rend fiers ?
Franchement, on ne maîtrise rien de tout ça, donc on se sent surtout très chanceux. Avec notre dernier album, on a vu arriver plein de nouveaux fans jeunes, et en même temps, ceux qui nous suivent depuis le début sont toujours là.
C’est fou de voir des publics de 16 à 75 ans dans la même salle. On fait un style qui reste assez niche, pas forcément dans le courant dominant français, donc ça rend cette fidélité encore plus précieuse. Et puis, quand on regarde autour de nous, beaucoup de groupes ont disparu. On se considère un peu comme des survivants. (rire)
Musicalement, on sent aussi chez vous une envie de se réinventer, surtout sur « 16 Dreams a Minute » votre dernier album.
Oui, c’est un vrai défi. On ne voulait pas faire du copier-coller de ce qui a marché. On veut rester fidèles à ce qui fait l’ADN du groupe, mais sans se lasser. L’important, c’est que nous, on soit toujours excités par ce qu’on fait.
Sur le dernier album, on a tenté de nouvelles choses, changé notre façon de composer. On ne sort un morceau que si on en est tous les quatre vraiment fiers. C’est notre garde-fou. Si l’un d’entre nous n’aime pas un refrain, on le retravaille. On fonctionne à l’unanimité.
Et on a conscience qu’on a changé, nous aussi. On n’a plus 20 ans, donc refaire exactement ce qu’on faisait à l’époque n’aurait pas de sens.
D’où vous viennent ces nouvelles inspirations, aujourd’hui ?
De partout. Ce qu’on vit, ce qu’on écoute, ce qu’on découvre par hasard. Il y a aussi beaucoup d’accidents heureux, des moments imprévus qui deviennent la base d’un morceau.
On est quatre, avec des goûts très différents et très larges. On essaie de mélanger tout ça pour créer quelque chose qui nous parle à tous. C’est ce qui donne peut-être cette richesse dans notre musique, surtout sur le dernier album.
Est-ce qu’il vous arrive de poser des limites à cette envie d’expérimentation, pour ne pas perdre le public ?
Nos limites, ce sont nos propres goûts. Si ça nous plaît à tous les quatre, c’est que c’est cohérent avec ce qu’on est. On n’essaie pas de suivre les tendances. On ne changera pas notre langage ou notre son juste parce que c’est à la mode.
On préfère nous faire plaisir à nous même en premier lieu. On pense que c’est le meilleur moyen de rester sincères, et ça finit toujours par parler à quelqu’un. À chaque album, on perd des fans forcément, on en gagne d’autres aussi. Ceux qui partent reviendront peut-être plus tard.
Et sur le plan visuel, vous avez une esthétique forte, notamment autour de l’animation. Comment abordez-vous cet aspect ?
On aime déléguer, faire confiance. Pour Sensational, par exemple, on a rencontré le producteur Ilan Uros après un concert. Il nous a mis en contact avec François-Marc Baillet, alias Marco, qui a fait le clip.
On fonctionne à l’instinct, à la rencontre. Sur notre album Pursuit, les clips animés ont cartonné. Il y a vraiment quelque chose qui se passe entre notre musique et l’animation. Donc on continue dans cette voie, toujours avec des gens qui nous inspirent.