Entrez dans l’univers poétique et solaire de Constance Amiot avec « After Summer ». Lorsque l’été s’efface doucement, que les lumières se font plus douces et que les heures s’étirent, c’est précisément dans cet entre-deux, cette saison palette d’émotions, que Constance Amiot a choisi de poser les notes de « After Summer ». Son nouvel opus, plein de souffle et nostalgie rayonnante, se lit comme un carnet de paysages intérieurs et de voyages sensibles. Dans cette interview-portrait, Constance partage l’élaboration de ses mélodies, les inspirations qui ont nourri ses textes, et la manière dont elle a voulu capter la fragilité et la force des instants que l’on croyait éphémères. Avec sa voix claire et sincère, elle parle d’amour, de détours, de choix et d’acceptation, tout en laissant respirer les silences, et l’espace entre les notes, entre les mots. Ce disque trace un chemin, une traversée où nous sommes invité à poser nos propres résonances. Comment retrouver l’élan après une saison intérieure ? Comment porter les cicatrices et les lumières du passé vers un horizon encore à dessiner ? After Summer esquisse ces réponses, avec pudeur et liberté. Plongez dans l’univers lumineux de Constance Amiot …
« After Summer » s’ouvre sur cette idée de renaissance et de transformation, comme dans « Wet Grass ». Qu’est-ce qui vous a inspiré ce fil conducteur du temps et du renouveau ?
C’est le cycle de la vie, de la nature, ce qui est ancien reviendra nouveau, et inversement. À travers l’écriture je m’accroche aux branches des souvenirs, j’interroge notre rapport au temps, à l’absence, au manque. Chaque geste que l’on fait va créer un écho, chaque moment vécu une éclaboussure, les sentiments se renouvellent. Dans une chanson on peut se réfugier dans un autre espace temps. Le temps est autre, on peut fixer un instant, l’ajuster, le réinventer, on peut rêver d’un passé qui devient présent, rembobiner…
Vous avez grandi entre l’Afrique, les États-Unis et la France : retrouve-t-on dans cet album des échos de ces voyages, de ces racines multiples ?
Il y a une palette de paysages dans cet album, mes chansons sont effectivement sculptées par les différents endroits où j’ai vécu. Par exemple, dans « Blue Guitar » on se retrouve projeté sur les rives du Potomac, dans l’État du Maryland. Dans « Devant Nous » on se promène sur les bords de la Méditerranée. On parcourt des kilomètres dans mes chansons!
L’album est décrit comme « chaud, acoustique, solaire et intime » : pouvez-vous nous raconter comment vous avez façonné ce son en studio avec Jean-Christophe Urbain ?
Je suis arrivée un matin au studio de Jean-Christophe avec un carnet de chansons et une guitare. C’est la première fois que je rentrais en studio avec si peu de préparatifs. Son studio est très chaleureux, j’avais l’impression d’être dans le décor d’un « home sweet home » rempli d’instruments et de vieilles machines analogiques. Lorsque j’ai commencé à jouer « Wet Grass », il a pris une guitare, il l’a désaccordée, il a placé un micro, et dès qu’il a commencé à jouer, les pickings s’entremêlaient, le bois craquait, l’ambiance était là. C’est la première chanson que nous avons enregistrée, nous avons gardé cette première prise, elle a donné le ton au reste de l’album.
Il y a très peu d’effets ou d’artifices dans ce disque. On a pris notre temps, on a laissé une place à l’imprévisible.
J’ai vu tous les morceaux se sculpter comme ça, jusqu’à la touche « play ».
Vos textes oscillent entre observation poétique et confidences intimes. Comment trouvez-vous l’équilibre entre pudeur et sincérité dans votre écriture ?
J’aime quand il y a plusieurs degrés de lecture dans l’écriture, quand une image poétique permet au lecteur de trouver sa place et son propre refuge. La pudeur n’interdit pas la sincérité. Les contours peuvent être un petit peu flous, mais l’émotion n’est pas gommée, elle est toujours là.
Vous chantez en anglais et en français, parfois dans le même projet. Comment se décide la langue d’une chanson ? Est-ce une question d’émotion, de musicalité, ou de hasard inspiré ?
J’ai une écriture très spontanée, pour moi la créativité et la spontanéité vont ensemble, on pourrait effectivement parler de hasard inspiré! Anglais, français, couplet, refrain, c’est un peu le chaos, il n’y a pas d’ordre.
Le choix de la langue se fait tout naturellement, j’essaie surtout de saisir une émotion avant qu’elle ne file. Parfois je choisis la langue comme je choisirais un instrument, si j’ai besoin de plus de percussions je me dirige vers le français, pour faire claquer les consonnes. D’autres fois je vais aller vers l’anglais pour étirer les mots comme des élastiques, puis les emmêler dans la mélodie. Il m’arrive aussi de faire des versions dans les deux langues, par exemple « Wet Grass » a une version française qui s’appelle « Promenade ».
Vous ouvrez de plus en plus votre écriture à d’autres auteurs et compositeurs. Qu’est-ce que cette collaboration apporte de différent à votre musique ?
L’échange, le partage, c’est ce que j’aime le plus dans la musique. J’adore collaborer avec d’autres artistes. Jérôme Attal va cueillir des mots qui sortent de mon répertoire habituel, c’est un bonheur d’adapter ses textes. Les mélodies de Renaud Flusin ou de Jean-Christophe Urbain m’ont amenées vers des territoires inconnus. Toutes les collaborations créent des surprises, elles nous permettent de prendre un autre chemin et de briser certaines habitudes.
Vous avez aussi composé pour le jeune public et pour l’image. En quoi ces expériences nourrissent-elles votre retour au format « album » adulte ?
Chacune de ces expériences résonne aujourd’hui. L’imaginaire du jeune public, l’ambiance de la musique à l’image. Par exemple, au début de la chanson « Turn it True », j’ai l’impression d’être dans un film des frères Coen ou sous le soleil de Pedro Almodovar.
On retrouve dans vos chansons des paysages très concrets – un cimetière enneigé, une herbe qui renaît, etc… Est-ce une manière pour vous de relier l’intime à l’universel ?
Tout est relié. L’universel prend sa force dans l’intime, avec une image très concrète, comme une herbe qui renaît ou un papier froissé, on peut faire ressentir une expérience commune, aller vers un sentiment plus universel. Où serons-nous demain? Qu’est-ce qu’on aurait pu être.
Vous êtes une guitariste affirmée, passée des open-mics du Maryland à la scène parisienne. Quel rôle joue encore aujourd’hui la guitare dans votre liberté de création ?
Avec une guitare et un bout de papier, je peux écrire partout dans le monde. C’est une chance d’avoir cette liberté, avec cet instrument nomade. J’ai encore beaucoup à apprendre avec cet instrument, c’est un voyage sans fin!
Si After Summer devait être le carnet de voyage d’une saison de votre vie, quelle page aimeriez-vous que l’auditeur garde en mémoire après l’avoir refermé ?
Je ne peux pas répondre à cette question! Laisser la page ouverte?
Photo de couv. (c)Théo Constance