INTERVIEW : CHLOÉ MONS, SENSUELLE “Ode to Bond”

Le 12 novembre Chloé Mons sort un nouvel album, un hymne à l’espion le plus charmeur du Globe, intitulé « Globe-Trotter – Ode to Bond». Plus que de simples reprises des B.O. du célèbre agent secret, elle réinvente, en plein confinement, 13 thèmes dans un jazz classieux, doux et sensuel. En résulte un véritable exutoire sous forme de tour du monde en compagnie de son fidèle guitariste Yan Péchin et du saxophoniste Frédéric Gastard. Voyage à fleur de songes teinté de notes sucrées, puis acidulées pour un cocktail subtil et enivrant qui en renforce la saveur addictive.
Mourir peut attendre, mais  notre impatience d’en savoir plus sur cet album souffre d’attendre encore , Chloé répond donc à nos questions sur cette intrigante aventure musicale.

Comment est venue cette idée de te lancer sur cet album autour de l’univers de James Bond ?
CHLOÉ : Alors, déjà, James Bond, c’est un mythe pour plein de gens, mais c’est un mythe familial. Dans ma famille, à chaque nouveau James Bond, c’était un événement, on allait à la première séance, le premier jour. Il y avait quelque chose d’un peu de rituel. J’ai grandi avec ce héros et j’étais évidemment toujours fascinée par les génériques qui sont vraiment très beaux, très particuliers avec là aussi des rituels, des formes, des éclairages et des chansons absolument extraordinaires. J’ai grandi avec ça et je m’étais toujours dit que j’aimerais bien un jour, faire une reprise de ces chansons. Ça trottait dans ma tête depuis plusieurs années. Et en fait, c’est arrivé à maturité avec le premier confinement qui a été brutal pour nous tous. Et je me suis dit, c’est dingue, en fait, tout ce qu’il y a dans ces films, que j’adore, qu’on adore, qui font rêver, maintenant on ne peut plus le faire. C’est à dire prendre un avion et s’envoler le matin pour Istanbul, le lendemain, partir à Shanghai, aller dans les palaces, boire des cocktails. La vie, quoi. C’est la vie glamour de globe-trotteur. C’était fini. Et du coup, j’en ai eu très envie. Et je me suis dit, je vais les reprendre à ma façon. C’est-à-dire, d’une façon désossée, comme si c’était le souvenir d’une chanteuse seule dans un bar qui se rappelait d’une époque engloutie. Et du coup, je me suis retrouvée seule devant mon piano et je les ai faites exactement dans cet esprit-là. Voilà, c’est ça l’histoire du disque. C’est ça l’idée.

As-tu rapidement cherché des gens avec qui collaborer ?
CHLOÉ : D’abord, j’ai fait toute seule. C’était pendant le confinement, j’ai fait toute seule au piano. Et puis, une fois que ça été fait, que le confinement est passé, j’ai dit, bon, il faut que j’enregistre maintenant. Et là bien sûr, j’en ai parlé à Yan Péchin avec qui je travaille depuis des années et des années, c’est mon frère de musique. Je lui ai dit voilà que j’aimerais un esprit club de jazz, comme ça un peu post-apocalyptique. Ces titres normalement ultras arrangés, mais avec l’essentiel. Et Yann m’a parlé de Frédéric Gastard. Et voilà, on a enregistré à 3, tout simplement.

C’est donc un album relativement intime ?
CHLOÉ : Les deux derniers je les ai complètement composés au piano. Ils ont tous été faits complètement seule au départ et c’est au moment de l’enregistrement que je m’entoure. Et enfin, je travaille toujours comme ça.

Est-ce le besoin, de t’approprier seule tes projets avant de pouvoir les construire et les mûrir avec d’autres ?
CHLOÉ : Il n’y a que moi qui sais ce que j’ai envie de faire en fait, comment je vais les mener. Donc, oui, c’est une histoire de création extrêmement intime. En tout cas, en ce qui me concerne, c’est très intime. Et le moment du studio, c’est déjà une autre étape de partage, d’humain et c’est très agréable.

Il y a un côté sensuel et glamour que tu apportes. Pourtant ce n’est pas forcément l’image que les gens ont de James Bond ?
CHLOÉ : Tu me dis que les gens n’ont pas l’impression que c’est sensuel James Bond ?

Il y a beaucoup de gens, quand tu leur poses la question de ce que James Bond représente, ils vont répondre plus facilement l’aventurier, l’espion, etc…  !
CHLOÉ : Oui mais c’est quand même un séducteur notoire James Bond avec ces James Bond Girl qui sont elles aussi mythiques. Donc, c’est quand même un univers extrêmement sensuel, sexuel, de conquêtes dans tous les sens du terme. Pour moi, c’est si évident, mais peut être effectivement que ça ne l’est peut-être pas pour l’ensemble des gens. Pour moi, c’est une évidence que ça parle quand même beaucoup de ça.

 

Cette sensualité que tu-as ajoutée, était-ce une volonté première pour toi ?
CHLOÉ : En fait, je fais les choses avec inspirations, avec instincts. Et je m’écoute en fait. J’écoute mon désir et où ça me porte. Mais je ne vais pas me dire, je vais faire cette chanson de façon très sensuelle. Non. Je la prends et je connecte mes accords et je vois comment ça sonne. Souvent ça me surprend je vois comment ça sort même, mais qu’elle possède un sens, ça me surprends moi-même. Voilà, ça donne ça à la fin. Effectivement, peut être que je ne me rends pas compte si c’est sensuel. Je n’en sais rien. Parce qu’en même temps, c’est très dépouillé. Mais c’est vrai que ça reste une histoire… c’est une femme au piano, donc, forcément déjà c’est sensuel. Le visuel, il y a la voix, il y a les mains sur le clavier, quelque chose d’extrêmement sensuel, certainement. Mais je ne sais pas. Ça se passe comme ça. Ça s’est passé comme ça, en tout cas dans ces chansons-là. Voilà, je pense que c’est moi. Ça me ressemble, ça, c’est sûr.

 

Quand j’ai écouté ton album, je me suis dit que cet album est une appropriation du personnage. C’était audacieux de faire ainsi ces morceaux !
CHLOÉ : Je les ai prises et je les ai refaites entièrement à ma façon. Je fais toujours une reprise par disque mais là, j’ai pris beaucoup, beaucoup de plaisir à faire ces morceaux, ça me fait rêver. Je ne sais pas, il y a quelque chose de magique dans ces exercices d’appropriations.

 

Là en réalité, maintenant que cet album, est fixé, comment tu envisages les choses par la suite sur scène ?
CHLOÉ : Sur scène j’ai envie qu’on soit en trio. Moi, au piano, Yann à la guitare et Fred au saxo. Donc vraiment former une base assez jazz en fait, mais qui reste très épurée, expérimentale et sobre en même temps. J’aime bien quand les choses sont très tenues.

James Bond dans ces films avaient une esthétique visuelle forte. Avec tes dix albums toi-même tu développes ta propre esthétique visuelle. Comment tu l’imagine, cette esthétique, pour celui-ci ?
CHLOÉ : Je fais toujours attention aux visuels de tout mes projets. La pochette, j’en suis très contente, la photo est très belle. J’ai toujours bien aimé faire des images, créer des ambiances. J’aime bien faire partie de cette histoire-là, me mettre dans les mains des photographes et de ce qu’ils ont en tête, et me laisser un peu faire. Alors, forcément quand j’ai un disque à faire vivre, j’ai évidemment des lignes, des directions, en tête. Là, James Bond, c’est très visuel puisqu’on a tous les films en mémoire. Donc là, je viens de faire un clip qui est très dans la ligné des James Bond, je me suis amusée à ça. Un vrai hommage, carrément frontal à James Bond. Mais il y en aura d’autres, et peut être retrouver d’autres idées, je ne sais pas encore. Je vais voir, parce que ça se fait à deux ces choses-là. Donc, rencontrer une vision… il faut rêver ensemble en fait. Il faut trouver quelqu’un avec qui on rêve un peu ensemble. Et puis on raconte une histoire.

 

Parmi  les 13 titres que tu as interprétés, est-ce qu’il y en a un qui, pour toi, représente complètement l’esthétiques de ce que tu imaginé au départ de cet album ?
CHLOÉ : Ouais, je dirais Moonraker et Goldfinger aussi. Ils sont tous iconiques en fait quand on aime James Bond, c’est très difficile de choisir. Mais Moonraker, je l’aime particulièrement ce titre, parce qu’il est vraiment très épuré.

 

Tu disais tout à l’heure, la COVID était là quand tu as commencé l’élaboration de cet album. Mais était-ce pour le rendre au vue de tout le monde ou cela pouvait-il être un projet qui serait resté dans les cartons juste pour toi, pour passer le temps, le temps de la COVID en plus ?
CHLOÉ : tant que les choses ne sont pas sorties, on les fait d’abord pour soi. En tout cas, c’était irrépressible. Et j’ai passé des semaines à faire ça avec passion et un grand bonheur. Après je suis une fille concrète qui fait exister les choses. Donc, très vite, je me suis dit, c’est le prochain album. Je suis très heureuse que ça sorte enfin.

A partir du moment où les disques sont pressés, il est abouti. Cela dit, j’ai déjà commencé à réfléchir à la prochaine aventure. Mais pour l’instant, je ne sais pas du tout. C’est vrai que les histoires de COVID, m’ont beaucoup affectées. Je n’ai pas réécrit depuis. J’ai besoin de temps, mais ça va revenir. Mais, je pense que ça a cassé quelque chose à un moment donné, en tout cas.

 

ça a rompu l’élan que tu avais ?
CHLOÉ : Ouais, je trouve que c’est difficile, quand on nous dit qu’on ne peut plus rien faire. C’est très démoralisant. Je pense qu’on a tous été atteints d’une façon ou d’une autre. Mais je pense que la création en a pris un coup. Je le vois autour de moi, ils ont tous été très, très touché par ça les créateurs. Ça ne nous a pas empêchés de faire des choses, mais pas trop. Et ce n’est pas anodin quand même, je pense qu’il y a des répercussions profondes, qu’on n’a pas fini de voir. Donc voilà, je me découvre dans cette actualité. Je me découvre tous les jours. Puis voilà, je ne sais pas, mais j’espère que ça va revenir. Je guette tous les élans, tous les desserts possibles. Mais ce n’est pas facile.

C’est d’autant plus problématique quand on est un artiste qui a besoin de s’expérimenter aux autres, c’est aussi se confronter à soi-même ?
CHLOÉ : Oui. Après, pour la création les artistes sont des confinés naturels, ce n’est pas compliqué, d’être chez soi et créer. Si tu veux c’est même comme ça qu’on vit. Donc ce n’est pas ça qui est le plus choquant. C’est l’impossibilité soudaine de faire rayonner notre travail. Ça, même si on a besoin de solitude et d’isolement pour faire notre travail. On ne crée pas pour rester dans sa chambre. L’étape d’après sa création c’est le partage. C’est quand même le plaisir de partager avec d’autres. C’est vrai que la COVID nous a empêché ça… C’est une grande violence. Je pense qu’on l’a tous ressenti dans notre chair. Et c’est vrai que pour retrouver le désir d’écrire, il faut un peu de temps. Ça va revenir avec le mouvement. Moi, je sais que dans tous mes albums, dans tous ce que j’ai fait, le mouvement a toujours été très important, j’ai beaucoup écrit en voyageant, dans les trains, dans les avions, dans les bus, dans des pays étrangers. Ça m’a toujours beaucoup inspiré le mouvement. Voilà je ne suis pas la première, on est beaucoup comme ça. Et d’un seul coup d’être dans l’incapacité de bouger, c’est très violent pour l’inspiration. Il faut découvrir d’autres choses, mais ce n’est pas forcément évident. Il faut apprivoiser tout ça.

 

Il faut peut-être aussi se réapproprier ce qu’on avait acquis ?
CHLOÉ : Ouais, c’est ça. Il faut refaire un chemin. En tout cas, ça demande du temps.

 

Tu disais tout à l’heure, que tu étais comme beaucoup en mode confinement, enfermé face à toi même, lorsque tu décides de mettre en œuvre un projet sur James Bond, qui représente pour toi le voyage. Etre enfermé et rêver à quelque chose qui t’emmène ailleurs. Ne trouves-tu pas qu’il y a une certaine forme de corrélation?
CHLOÉ : absolument. Ce n’est pas pour rien que c’était le moment ou jamais pour le faire. D’un seul coup, j’avais tellement besoin que j’ai fantasmé là-dessus et j’ai re-voyagé, j’ai refait ces films, j’ai revécu cet atmosphère toute seule à mon piano et sont venus ces titres. Ce piano était devenu ma fenêtre. C’était très agréable, de faire ça en fait. C’était des moments de délice musical.

Et pour toi, de tous les acteurs qui ont incarné James Bond, esthétiquement ou même sensuellement, lequel incarnerait le plus celui de ton album ?
CHLOÉ : Je les trouve tous superbes. Franchement, j’adore Roger Moore, Pierce Brosnan, Daniel Craig, George Lazenby. Il n’y a que Timothy Dalton que j’aime moins. Mais sinon je trouve qu’ils peuvent tous être dignes d’être mon James Bond idéal.

Ils peuvent tous être présents dans ton album alors ?
CHLOÉ : Franchement, oui. Oui, oui, sans problème. je veux bien tous qu’ils m’invitent. (rire).

J’en ai une petite dernière. Et si James Bond n’avait pas existé ?
CHLOÉ : Il faudrait l’inventer. Tout simplement.

 

 

 

CHLOÉ MONS « Globe-Trotter – Ode to Bond» 12 novembre 2021

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Stef’Arzak

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