“Eva en Août” de Jonas Trueba. Sunny Girlfriend.

“She owns and operates her own sunshine factory
Painting smiles on dolls and then on me
She’s my sunny girlfriend, and personality
Well, she’s got a book that tells about everybody’s past
And she can make you slow while making your mind move fast
She’s my sunny girlfriend, and she is never less”

Rien de mieux qu’un bon vieux titre des Monkeys pour dépeindre le cinquième film solaire de Jonas Trueba. “Eva en Août“, sorti cet été 2020 en pleine torpeur endémique, est un joyau hispanique. Une petite merveille de douceur. Un film qui privilégie le hasard au destin tout tracé.
Eva, trentenaire lumineuse, décide de rester à Madrid durant les vacances et de se laisser porter par la Vie au gré de ses déambulations. Age des possibles. Chaleur et Indolence. Le Monde s’ouvre à elle mais la tétanise. Ses Amours ? Contrariés. Sa soif de saisir l’instant ? Omniprésente.
La Miss flâne et procrastine. Suit des inconnus. S’obstine sans jamais se perdre. Point d’enjeu scénaristique ni de finalité. D’innombrables scénettes (sous formes de pochettes surprises) serviront de trame à la trajectoire en zig-zag de notre “Eva-naissante” et son épilogue heureux séduira autant qu’il décontenancera.
Vingt-cinq ans après “Conte d’été” d’Éric Rohmer, la période estivale est, à nouveau, le cadre propice au marivaudage et aux interrogations. Portrait d’une jeune femme en devenir, “Eva en Août” croque avec subtilité les hésitations d’une madrilène “sous influence” sans jamais verser dans la facilité ni l’ennui.
En ce sens, Jonas Trueba magnifie les aléas du quotidien avec brio. Science du montage, photographie diaprée et chatoyante et moments improvisés (ou pas) saisis à la volée, tout participe à l’auscultation quasi documentaire d’une Carte du Tendre.
Là où de nombreux réalisateurs français se “crasheraient” dans la lente observation de leur nombril, le réalisateur hispanique enjolive chaque chapitre-et chaque jour- de son héroïne en terrain connu.

Cinéaste de la par(ab)ole, plus porté sur le “voyage intérieur” que sur la comédie de mœurs, les échappées périphériques que les ressorts dramatiques, le fils de Fernando Trueba est un scénariste romantique métaphysique. Eva est son astre. Sa muse. Son émoi érotique en péninsule ibérique.
Et quand Eva fait des circonvolutions autour de ses désirs, son mentor tourne.
Interprété divinement par la diaphane Itsaso Arana et dotée d’une distribution remarquable de justesse, “La virgen de agosto” démontre que les comédiennes et comédiens de la BBC ou de la Royal Shakespeare Company ne sont pas les seul(e)s à détenir le trophée de l’Acting.
Et que le Cinéma espagnol, qu’il verse dans le “polar” ou l’évocation historique, possède de belles heures devant lui.
Laissez-vous enchanter par ce film charmant, touchant, léger et bien plus profond qu’il n’y parait. Puis, si vous possédez l’excellente édition double DVD, enchainez avec “Los Exiliados Romanticos“.
Je peux vous garantir un plaisir infini. Et l’Amour l’après-midi.

John Book.