Dans le dernier clip de ZATO, réalisé par Benjamin Chagneux, l’image prolonge, la métamorphose, la fait respirer. « Days-illusion » s’ouvre et se déroule comme un conte intriguant, où une colporteuse de rêves s’abrite dans un monde tapissé de lapins fantasques, tandis qu’un loup solitaire erre en silence. Mais que voit-on vraiment ? Est-ce une fable animalière, une parabole sur l’illusion, ou bien le miroir de nos propres désirs de fuite ?
La mélopée introspective qui enveloppe le morceau installe une lenteur vibrante au cœur d’un paysage brumeux, feutré, hypnotique, qui semble chercher à refléter le rêve d’un imaginarium fantasmagorique. Peut-être que la relation entre l’être humain et l’animal et la question de l’identité n’en sont pas éloignées. Quoi qu’il en soit à mesure que la musique se déploie, la narration magique opère.
Ici, l’œil se perd dans les murs chargés du sanatorium de Bergesserin, décor qui suinte l’étrangeté et la mémoire abimée. Là, les personnages, véritables animaux humains, deviennent autant des acteurs hallucinés, guettant une fête pour noyer les désillusions d’un vieux monde peuplé de prédateurs. qui se cache derrière le Loup Illusionniste, masque identitaire, ou simple projection ? La réponse importe-t-elle encore, lorsque le réel vacille ?
Benjamin Chagneux, puisant à la fois dans l’austère poésie de Tarkovski et la symétrie ludique de Wes Anderson, compose un objet hybride : entre clip et court-métrage, mais une œuvre organique où chaque plan palpite. Tout y respire la frontière, cette ligne fragile où l’on hésite entre rêve ou cauchemar, douceur ou menace, vérité ou mirage.
Depuis 2008, le duo, ZATO violon, guitare baryton, boîte à rythmes et deux voix, avance en funambule sur le fil d’un indie-rock sombre et minimaliste, nourri de folk, de post-rock et de trip-hop. Sur scène, depuis 2022, l’arrivée d’un batteur a élargi le spectre, densifié les pulsations. Plus de 300 concerts, un film musical (Black is the light), une discographie habitée par la quête d’ombres et de lueurs où ZATO sculpte un univers en quête de traversé. Leur dernière étape, Broken Faces (2022, OSTO Records), confirmait déjà cette intensité. Et le chemin continue : du split vinyle avec 6 Ton Records au single On the Gateway (2024), le groupe ne cesse de tisser son propre territoire sonore, à la fois initiatique et viscéral.