Dixième disque, mais toujours cette manière unique d’arpenter la pop en parfait funambule charismatique. Avec « Allbarone », sorti le 12 septembre 2025 chez Heavenly Recordings, Baxter Dury déploie une fresque nocturne, grinçante, presque théâtrale. Produit par Paul Epworth (Adele, Florence & The Machine), l’album pulse d’une tension nouvelle : beats soyeux contre guitares rêches, nappes synthétiques qui se froissent comme des rideaux de velours.
Deux voix se croisent, deux figures s’affrontent. Baxter en maître de cérémonie cabossé avec ses personnages grotesques mais poignants, ce dandy moustachu à mocassins de Shoreditch, ce gangster de Chiswick, deviennent autant de miroirs déformés d’une société londonienne en clair-obscur. On avance dans l’album comme dans un roman graphique : des basses moites qui cognent comme des cœurs trop lourds, des refrains falots, mais obsédants, des spoken words suspendus entre menace et confession.
Est-ce du groove post-disco ? Un spoken pop halluciné ? Ou une satire sonore déguisée en dance-floor intime ? Peu importe. Baxter Dury, avec ses phrases tranchantes comme des éclats de verre, sculpte un espace où l’ironie côtoie la tendresse.
On pense à Serge Gainsbourg pour le flegme légendaire, à LCD Soundsystem pour la nervosité élégante, à l’école des crooners déchus qui transforment chaque défaut en éclat. Mais derrière les textures brillamment produites par Paul Epworth, c’est toujours la silhouette de Baxter qui domine : un anti-héros punk en costard qui claque, qui raconte les laideurs du monde avec la grâce d’un conteur urbain.
Allbarone ressemble a une galerie de portraits cruels et lumineux, où l’on danse avec soi, entre sarcasme et mélancolie.