[Ciné] Eté 2025, révisons nos classiques! « Fenêtre sur Pacifique » de John Schlesinger.

A défaut de pouvoir me rendre, séance tenante, dans les salles obscures en ce torride été 2025, j’opte pour la découverte de certains classiques et/ou nanars de l’Histoire du cinéma via mon salon. Voici, donc, une sélection de longs-métrages vus, appréciés (ou non) et décortiqués par votre serviteur, dans l’espoir de vous égayer ou aiguiller. On commence cette série estivale par un thriller de 1991 dont la mécanique m’avait, lors de sa sortie, fait forte impression :  » Fenêtre sur Pacifique » de John Schlesinger. En ces frémissantes 90’s, la mode hollywoodienne est au huis-clos anxiogène. « Liaison Fatale  » d’Adrian Lyne en 1988, « Misery » de Rob Reiner en 1990 et le futur « JF partagerait appartement » de Barbet Schroeder en 1992 en attestent : la menace ne claironne plus hors de nos frontières. Non. En ce début de décennie pleine de promesses, le Mal quotidien s’introduit dans nos vies, nos appartements et rôde au plus près de nous.
Pour ce film de commande et à l’instar du Maitre Alfred Hitchcock, John Schlesinger (« Macadam Cowboy » et « Marathon Man »), faute de projets, accepte de se plier à l’exercice du polar tout en y injectant son ADN de réalisateur culte. Ce chantre de la nouvelle Vague Britannique vient courageusement de faire son coming-out et, dans l’esprit de ses précédentes productions, décide de parsemer son « Pacific Eights » d’éléments « gays » afin de tordre le cou à l’establishment en vogue. Ici, un couple de voisins homosexuels on ne peut plus banal. Là, deux femmes locataires délicieusement voyeuses. Plus loin, une empoignade entre Carter Hayes et son compagnon de chambre et, in fine, la résolution d’un imbroglio juridique par le personnage féminin principal, bien loin des sempiternels codes attendus. Morgan Creek production et le public n’y voient que du feu mais les cinéphiles exultent.
Question réalisation, notre movie-maker déploie des trésors d’inventivité, bouscule ses caméras et entame des scènes au ras du sol ou par le prisme de travellings nerveux. Loin de plagier les chefs d’œuvre du 7ème art,  » Fenêtre sur Pacifique » ne cesse de briller par sa simplicité, son élégance et son efficacité. Bien entendu, le clin d’œil adressé à Hitch’ est évident, tant dans l’aspect de sa demeure victorienne proche de « Psychose » que dans sa géographie (Vertigo/San Francisco) ou son casting malin. En ce sens, Tippi Hedren-« Les Oiseaux »- et Mélanie Griffith-« Body Double » ne se croisent jamais mais mère et fille partagent l’affiche pour notre plus grande satisfaction. Face à elles, Michael Keaton piétine la droiture du Chevalier Noir dans un amusant jeu de massacre et annonce son goût prononcé pour les personnages troubles et déphasés (revoir le mésestimé « L’Enjeu » ou le délirant  » Mes doubles, ma femme et moi »). Seul bémol dans cette partition, le pauvre Matthew Modine fait ce qu’il peut avec un personnage naïf, mal dessiné et destiné préalablement à Christopher Reeve, heureusement jugé trop « vieux » pour ce rôle !

« Fenêtre sur Pacifique » est un voluptueux cauchemar. De ceux qui vous hantent des jours durant tant les moments forts s’accumulent et s’imprègnent dans votre rétine.

Cerise sur le pancake et au détour de dialogues bien troussés, le racisme ordinaire ou l’abime économique séparant la middle class de la haute société sont évoqués avec intelligence et doigté.
Ou quand le social déniaise le blockbuster, l’air de rien…

Cette « Fenêtre sur Pacifique » m’avait emballé du haut de mes 20 ans. Quelques années plus tard, je comprends un peu mieux les raisons de mon engouement. Voici un long-métrage honnête qui ne triche jamais. Ni dans son propos de divertissement haut de gamme, ni dans ses ficelles astucieusement retravaillées. Point de twists surréalistes. Point de dénouement grandiloquent. Amateurs de films sobres, « à la papa », et au suspens savamment distillé, abandonnez l’espace de deux heures vos séries addictives.
Descente aux Enfers assurée.
Back to the Basics ! 
Back to the Basement…les nuisibles en plus!
 
John Book.