[Chronique Ciné] 28 ans plus tard, enfin!

Genre: Horreur

Réalisateur: Danny Boyle

Scénariste: Alex Garland 

Avec : Aaron Taylor-Johnson, Jodie Comer, Alfie Williams et Ralph Fiennes

Musique : Young Father

 

Le pitch: 28 ans après l’épidémie de rage qui a dévasté l’Angleterre, les survivants réussissent à organiser une semblant de vie sur Holy Island, presque île située sur la côte Ecossaise. Le jeune Spike doit faire sa première sortie sur le continent avec son père Jamie et ainsi valider son passage à l’âge adulte. Sur place, il découvre un autre monde mais surtout la présence d’un ancien médecin qui pourrait venir en aide à sa mère Isla, atteinte d’une maladie inconnue. 

Mon avis (qui vaut ce qu’il vaut et sera forcément subjectif et bourré de gros spoils! ): 

Ca faisait 23 ans que j’attendais ce film maintes fois annoncé, maintes fois annulé ou reporté, il faisait figure de légende urbaine du cinéma. Etant une très grande fan à la fois de Dany Boyle (Transpotting, A life less ordinary, Sunshine et Petits Meurtres entre amis) et d’Alex Garland (Men, Civile War, Ex machina, Annihilation) , l’annonce du fameux duo aux commandes de ce nouvel opus ne pouvait que me réjouir. 

L’histoire balaie donc d’un simple carton les interrogations qu’auraient pu susciter la fin du deux où les infectés arrivaient à Paris. On nous explique pas comment la menace a été éradiquée du continent alors qu’elle fait encore « fureur » sur l’île de Grande-Bretagne. Ce qui, d’ailleurs, n’est pas tout à fait juste car une carte montrée rapidement inclut également l’Irlande dans sa totalité. Donc brexit ou pas, il s’agit plutôt d’un problème d’insulaires que de politique au sens pur. On voit quelques passages où il est question des autres pays, mais surtout pour montrer qu’il n’y en a rien à en attendre. La séquence d’intro, suivant la tradition des 28, est excellente et très flippante, même si je trouve dommage d’avoir joué sur le côté enfantin pour faire crier.

Les Teletubbies comme vous allez adorer les détester! 

Je n’attendais rien de l’histoire en elle-même tant le mythe zombie et consort a été traité sous toutes les formes pour le meilleur comme pour le pire, mais Danny Boyle, avec 28 jours, avait quand même changé la donne puisqu’ici il ne s’agit pas de morts-vivants mais de personnes bien vivantes contaminées. Elles restent donc soumises à quelques injonctions comme boire, manger, voire même se reproduire !

Dans 28 ans, même si les contaminés ont quelque peu évolué, Boyle et Garland restent fidèles au lord qu’ils ont savamment mis en place. On entre donc dans la petite histoire au milieu de la grande en suivant le jeune Spike qui commence sa vie d’adulte par une chasse avec son cher papa. Papa qui semble bien convenir à l’image qu’on s’en fait : rugueux, infidèle, brutal. La chose est bien faite car ce qui avait été vendu dans la bande-annonce se trouve changé dans l’histoire. Le père n’est pas rassurant ou protecteur, le médecin annoncé comme fou avec son allure effrayante est en fait un personnage doux et humain qui rechigne même à tuer un infecté s’il peut faire autrement. 

On retrouve quelques passages types de 28 jours, avec la famille, l’arrivée de militaires qui font basculer le destin des protagonistes, la folie du final dont on dirait qu’il est cartoonesque mais aussi très typique du cinéma de Danny Boyle. L’histoire avec le bébé va nous donner quelques sympathiques rebondissements dans les suites, à n’en pas douter.Si on peut parfois reprocher des choix douteux de certains personnages, l’histoire nous absorbe car elle est magnifiée par une réalisation absolument géniale. Le rythme est soutenu, l’angoisse vous tend et les décors sont sublimes. La fin a fait soulever plus d’un sourcil : on retrouve un Jack O’Connell, aka Sir Jimmy Crisal, tout auréolé de son succès dans Sinners, qui cabotine comme jamais dans son déguisement de très mauvais goût aux couleurs de Jimmy Savile, l’ogre de la BBC. On note la réf à Orange mécanique, totalement assumée. Il fallait un moment WTF, le voici ! 

Le cast est bon, Aaron Taylor-Johnson donne corps à ce père qu’on sent pris entre son amour pour son fils et son besoin vital d’en faire un homme-un-vrai-qui-sait-tuer-des-trucs. Jodie Comer ne révolutionne rien et souffre d’un jeu un peu agaçant, comme on avait pu le voir dans The Bikeriders. Ralph Fiennes apporte de la douceur, une finesse de jeu à l’ensemble, mais c’est surtout le jeune Alfie Williams qui brille, qui porte le film sur ses petites épaules et quelle incroyable découverte ! 

Le premier volet de la saga était tourné avec des mini-caméras DV grand public, son efficacité n’est plus à prouver et se trouve encore citée en exemple pour les particularités que cela apportait à l’intrigue. Ici on est sur du iPhone 15 avec une armada d’objectifs et quelques trouvailles comme le ring permettant de créer un effet bullet time proche de Matrix. Le film est en format ultra-large 2,76:1, qui donne une ampleur incroyable aux images, et quelques techniques de sioux sont utilisées, comme la caméra embarquée sur des animaux, les comédiens et quelques plans au drone plus convenus. Cela ne gâche en rien le film, bien au contraire, car Boyle sait ce qu’il fait et nous offre des plans poétiques, angoissants ou carrément horrifiques. Mention spéciale au plan de l’aurore boréale sur le passage immergé vers l’île, absolument sublime. 

Je croise les doigts pour que le prochain qui sera signé Nia DaCosta (Candyman, The Marvels) soit à la hauteur de la folie de ce premier-dernier volet, bien que je ne doute pas de la beauté qu’elle pourra y apporter.

Le travail sur le son signé Johnnie Burn (La zone d’intérêt) se marie admirablement bien à la BO de Young Fathers, groupe de hip-hop électro à la Massive Attack, donc je vous recommande l’écoute tant l’album est étrangement solaire avec ce titre sublimement rock : Lowly !

 

Un régal pour les aficionados des premières heures, une découverte pour les novices qui se délecteront d’une nouvelle saga, une attente qui en valait la peine. Merci Mr Boyle et Mr Garland pour ça!