L’art de ressusciter les morts sans perdre le sourire. Il fallait bien deux esprits retors pour imaginer un disque pareil.
D’un côté, Ian Svenonius, dandy prêcheur de Washington, gourou d’une contre-culture qui ne meurt jamais vraiment mais adore s’écouter agoniser. De l’autre, Memphis Electronic, alias Didier Balducci, électron niçois des Dum Dum Boys, savant fou du fuzz et du recyclage sonore. Entre eux, l’Atlantique – barrière sanitaire indispensable, tant la rencontre aurait pu provoquer une fusion atomique.
Sous le nom XYZ, les deux artisans jouent à faire parler les fantômes du rock. Leur disque, Plays The Classics, n’a de “classique” que le titre. Il ne s’agit pas de reprises, mais de nécropsies joyeuses : Svenonius et Balducci ouvrent les corps glorieux des Kinks, des Seeds, des Beatles, pour y glisser des organes neufs, des riffs, des boîtes à rythmes, des textes retouchés à l’acide.
Le résultat donne une sorte de danse macabre terriblement vivante.
XYZ ne cite pas, il détourne. Il ne vénère pas, il s’amuse. Dans “I Got You”, la tension brute de “You Really Got Me” se mue en clin d’œil narquois ; “Revolution N°8 1/2” fait vaciller le mythe Beatles dans un vertige surréaliste. Chaque morceau est une expérience de dissection menée avec ironie, où la nostalgie se fait instrument de subversion.
C’est cynique, oui, mais d’un cynisme élégant, celui des esthètes qui savent que tout a déjà été dit, mais refusent d’arrêter la conversation. Même la pochette pousse le concept jusqu’au bout : vieux disques de vide-greniers recyclés, affublés de stickers et de griffonnages, chaque exemplaire devenant une petite œuvre unique, mi-art brut, mi-plaisanterie dada.
On imagine le duo ricaner en les emballant, satisfaits d’avoir transformé le déchet en manifeste.
Plays The Classics c’est une leçon de désinvolture, une manière de rappeler que le rock, quand il cesse d’être subversif, devient musée et qu’il suffit de deux esprits lucides pour lui rendre un peu de sa fièvre.
XYZ signe ici un disque drôle, érudit, pernicieux, qui joue à la fois avec la mémoire et avec le feu.
Un album à écouter comme on sirote un cocktail trop fort : en riant du monde, mais avec élégance.
L’écoute du nouveau XYZ « PLAYS THE CLASSICS » non seulement seulement pour votre plaisir, Mais aussi et surtout un devoir de rockeur !
Photo de couv. Richard Prompt