[Interview] Sylvain Fesson explore les genres musicaux

Artiste accompli, Sylvain Fesson a sorti courant 2023 Origami, un deuxième album de chanson indie pop en français qu’il continue de feuilletonner en clips en 2024.

Installée en région parisienne, Sylvain Fesson est un ancien journaliste rock freelance tellement passionné par la musique et par la poésie qu’il s’est mis à faire des chansons à partir de 2013.

Fruit des morceaux issus de cette première période, il a sorti en 2021 Sonique-moi, un premier album auto-produit qui lui a souvent valu à tort d’être considéré comme un slameur et non un chanteur ; de même a-t-il sorti en 2017, uniquement sur internet, deux EP, Amy (I) et Amy (II), «  six longs morceaux assez minimalistes et parfois jazzy encore plus spoken que Sonique-moi », qu’il compte un jour réunir en CD.

Parce qu’en attendant, « dans un souci de stratégique artistique afin d’installer une sorte de narratif », comme il préférait commencer à dévoiler sa facette « plus pop et chantante », il a choisi de sortir en mai 2023 l’album Origami.

Bye bye donc l’ambiance sonique qui caractérisait justement Sonique-moi. « Oui, Origami n’est pas basé sur la guitare mais mon parti-pris artistique n’est pas de faire de la musique à guitares, j’aime ça, mais j’aime tellement d’autres choses. Mon désir est de faire une musique qui ne soit pas genrée. »

Sylvain Fesson aime surtout explorer différentes envies et différentes ambiances. « Dans Origami, il y a donc une grand diversité de styles. On me dit parfois que c’est déstabilisant. Je me dis que c’est qu’ils n’ont pas pris le temps d’écouter le disque ou que c’est le résultat d’une première écoute, après ça s’estompe. »

La musique de Sylvain Fesson est par moments ésotérique. Influencé par Talk-Talk et Alain Bashung, il invite au voyage pour découvrir les albums des autres et les siens. « Je fais de la musique émotionnelle. Dans les années 80 et 90 durant lesquelles j’ai grandi, il y avait des groupes qui faisaient des choses très incarnées et émotionnellement fortes. Naturellement, à ma manière, je suis sur ce chemin qu’ils ont commencé à défricher. Il reste aventureux. Je ne peux donc pas faire de la chanson passe-partout. J’avance au flair et aux visions.»

Le besoin d’une certaine forme de stratégie lui apparaît tout de même nécessaire. « Les grands artistes comme Bowie, Bashung, Gainsbourg, sont de grands stratèges et directeurs artistiques. Ils s’en remettent à l’aventure mais ils ont une vision. Et ta vision, ton souffle, il est bien sûr au cœur de tes chansons mais si tu vois assez loin, tu peux en prolonger le geste dans ta communication et ton image. »

Fidèle a ses convictions, Sylvain Fesson ne souhaite pas installer un personnage au détriment de ses chansons. « Je n’ai pas cette passion. Jouer un personnage peut aider à véhiculer de l’imaginaire, c’est sûr. Mais ça aide surtout à vendre, rendre visible, c’est comme un drapeau planté sur un bout de territoire ou une identité fixe et criarde à l’heure où tout devient virtuel et hologramme donc… J’aurais tendance à dire que ça enferme aussi. Du coup l’incarnation telle que je la pratique a un peu du plomb dans l’aile. »

Désormais, pour réussir, beaucoup se façonnent un personnage jusqu’à s’en rendre fou. « Dans la pop, l’image a toujours été au moins aussi importante que la musique. Mais aujourd’hui avec l’accélération de nos vies et la prolifération des écrans, l’image a pris encore plus de poids parce que si on de moins en moins de temps pour s’immerger dans le son, on a toujours le temps pour capter une image. Un clin d’œil suffit. Et au jeu du personnage, encore une fois, tout le monde n’est pas Bowie. En tous cas, je pense qu’il faut de l’intellect et du sensoriel pour mener à bien sa trajectoire artistique. Sans les deux c’est dur de tracer sa ligne. »

Lancé sur sa voie, Sylvain Fesson change régulièrement de musiciens. « J’ai progressivement développer une capacité à composer à la voix, donc aujourd’hui je pourrais presque dire que je suis un compositeur mais je ne suis pas un instrumentiste. Et ne pas être musicien, je vois ça comme une chance car je suis obligé de m’ouvrir à d’autres et ça dope l’expérience artistique. Les chansons franchissent des paliers quand on les fait à plusieurs. Et c’est très rare de voir des auteurs-compositeurs-interprètes qui font des trucs mortels tout seul de A à Z. Donc voilà, moi je forme des binômes. Et je pense qu’il ne faut pas laisser la musique aux musiciens ! Enfin pas les chansons ! »

Engagé jusqu’à présent dans une démarche d’autoproduction, Sylvain Fesson apprécie beaucoup sa liberté de faire et accompagne chacun de ses morceaux de clips oniriques et sensuels. « Je me suis mis à en faire de manière très spontanée, de la même manière qu’à une autre époque j’avais monté un site d’interviews rock, parce que c’était facile et que j’avais envie. Et aujourd’hui, idem, avec Youtube, un bon smartphone et un monteur c’est devenu possible pour monsieur et madame tout le monde de réaliser des clips. Or des images me venaient à chaque fois que je finissais un morceau. Donc je m’y suis mis et je mets autant de soin et d’énergie à réaliser un clip que la chanson qui le nécessite. »

Patrick Auffret

7e clip extrait de l’album Origami, « Parfois » est à découvrir ici :

Pour suivre Sylvain Fesson sur internet :

https://www.sylvainfesson.com

https://sylvain-fesson.bandcamp.com/

https://www.tqidr.com/sortie/origami

https://www.facebook.com/sylvainsfchansons/