S.G. Goodman – « Planting By The Signs »

Depuis les terres basses du Kentucky, S.G. Goodman revient avec Planting by the Signs, un album qui respire la sève ancienne et les poussières d’un monde en mutation.

Originaire du Kentucky, S.G. Goodman a tracé depuis quelques années une route singulière dans l’americana et le folk-rock indé. Avec Old Time Feeling (2020) elle dévoilait une voix brute, vibrante, prête à affronter autant l’héritage sudiste que les fractures politiques de son temps puis Teeth Marks (2022) confirmait ce talent rare avec un disque viscéral, hanté par les douleurs intimes et les tensions collectives, porté par une écriture d’une acuité désarmante. Avec « Planting by the Signs », elle franchit un nouveau seuil, consolidant une œuvre où s’entremêlent fragilité et force, ancrage rural et souffle universel.

Onze chansons magnétiques, précieuses telles des gemmes déposées à la croisée des cycles lunaires et des pulsations électriques. Comment ne pas y voir une tentative de réconciliation : entre la fragilité de l’intime et le grondement du collectif, entre la mémoire des anciens gestes et le tumulte d’un présent saturé de vitesse ?

Les textures s’entrelacent, de guitares claires teintées d’atmosphères diaphanes où flotte une voix à la fois bouleversante et souveraine. Autant de jaillissements rock, précis, rugueux, montrant combien Goodman maitrise l’intensité du live.

On pense tour à tour aux ballades désarmantes de Lucinda Williams, aux échappées atmosphériques d’Angel Olsen, aux incandescences folk de Jason Molina. Tout est sublimé par ce timbre singulier, capable de transmettre une palette d’émotions avec une vraie beauté prégnante.

« Planting by the Signs » est aussi traversé par des ombres : le deuil, la mémoire d’un mentor disparu, la nécessité de réapprendre à collaborer avec le guitariste Matthew Rowan. De ces épreuves naît une énergie neuve, tendue mais lumineuse. Patience, d’un fil conducteur entre l’humain et le cosmos, entre le deuil et la joie, entre l’ancrage et l’envol. Le titre Fire Sign brûle comme un mantra de survie. Satellite trace des arcs mélodiques suspendus. Snapping Turtle mord au cœur. I’m in Love éclaire l’album d’une douceur captivante.

S.G. Goodman semble nous rappeler que jouer, aimer, planter, créer… ne sont pas des actes séparés, mais des gestes d’une même nécessité.

Un disque d’équilibre et de tempêtes, où chaque vibration est une prière discrète à la nature et à la mémoire. Un disque pour apprendre à ralentir, écouter, et marcher ensemble.

 

photo de couv. (c) Ryan Hartley