Kas Product Reload, Roubaix – Samedi 24 février

Kas Product Reload , on les rejoint ce samedi soir à Roubaix de manière impromptue grâce à l’invitation in extremis de Pierre Corneau. On les avait déjà vus en juin dernier dans l’espace surchauffée d’une salle des fêtes dans la banlieue lilloise. Les retrouver une nuit de pleine lune lors d’un concert très privé est déjà gage de courts-circuits voire de métamorphoses…. Faut vous dire monsieur-madame que chez ces gens là on côtoie l’histoire…. Le dignitaire – député, sénateur et comte (accessoirement maire de la commune)- qui donna son nom à la rue où est sise la maison de maître qui accueille le concert, reçut dans sa propriété le 29/08/1867 Napoléon III et Eugénie. Du beau linge ! Vite noirci par les épaisses fumées de « la ville aux mille cheminées » : la Manchester française mon cher Pierre Corneau (qui va nous tisser la soirée en arpèges façon Peter Hook – un modèle de bassiste- ) ! ( Et pas accessoirement ) 16/05/1967 dernier concert de Jacques Brel. Une heure. Et trente minutes de rappel. Un peu plus court que le concert – d’un seul trait – de KPR. « L’ballot qui finque » : la cheminée qui fume et crache les gaz délétères des machines à feu.
Une image appropriée pour le trio Mona Soyoc, Thomas Bouetel, Pierre Corneau qui nous aura transporté dans une transe ( en danse ) mécanique. La révolution est en marche ! Pourtant les sonorités brutes inaugurées dès 1980 par Kas Product, les sons analogiques de la rythmique métallique et le grondement sourd des rouages en action portés par le regretté Spatsz gardent étonnamment leur vigueur malgré l’équipement sobre du soutier Thomas Bouetel. Clavier minimaliste façon Bontempi-baby, percus électroniques pas plus larges que la paume de ma main, boîtier magique qui semble regorger de plus de boucles sonores que la caverne d’Ali Baba de trésors… et pourtant aussi austère que le tableau de bord d’une Fiat Polski ! La voix éternellement soul et sensuelle de Mona Soyoc ( Aurait elle signé un pacte avec le Malin ? ). C’est vrai (on en avait eu la preuve lors du concert de l’Aeronef hors les murs l’été dernier) aussi que la basse de Pierre Corneau amène une pulsation organique…. nouvelle.
Mais faut vous dire monsieur-madame que le Reload de KP a, sans bifurquer, trouvé de nouvelles voies. En attestent les quelques titres du futur album joués ce soir. Sans me répandre dans les détails j’évoquerai un boogie-blues qui pulse façon Status Quo et possède de quoi réveiller le titanesque Howlin Wolf lui-même ! Au lieu de qui devant la frêle silhouette de Mona on se surprend à hurler à la lune comme le loup de Tex Avery devant le chaperon rouge encapuchonné…. Des impressions très différentes de ce fait par rapport à la précédente « tournée »…. certes les lieux – magiques pour la cité roubaisienne et témoins d’un riche passé- et l’accueil des hôtes contribuèrent à ça…. Et pourtant repartant ( Mais il est tard monsieur-madame. Il faut que je rentre chez moi. ) et traversant à une portée de lance pierre le quartier de l’Epeule dans son fourmillement de boutiques 24h sur 24 et les silhouettes encapuchonnées (celles-ci ) de dealers, on se dit que grâce à l’ami Pierre Corneau on aura vécu un moment ailleurs dont on se souviendra longtemps…. Sacrées nuits de la pleine lune !
Jean-Luc Galus