Des pulsations, des mots, une force, une énergie viscérale, un charisme dingue aux multiples facettes, Jehnny Beth, plus incandescente que jamais, embrase une nouvelle étincelle révolutionnaire, nommée « You Heartbreaker, You ». Quelle que soit l’apparence que l’ex-chanteuse des Savages choisit d’adopter, il est évident qu’elle n’a définitivement peur de rien et avec son deuxième album solo, elle fracasse tout pour mieux faire battre les cœurs.
En 30 minutes, elle propose neuf morceaux fulgurants, formant un manifeste sonore abrasif qui tranche dans la chair vive de notre époque.
Le morceau d’ouverture, « Broken Rib », est une plaie ouverte qui se transforme en percussion, éclat de verre vibrant au rythme de sa voix où Jehnny apparaît l’esprit meurtri, mais déterminé. On la sent serrer les dents et avancer en titubant sur ce morceau tendu et discordant où sa douleur est aussi aiguë qu’un éclat de verre enfoncé dans le poignet. L’album s’installe d’emblée dans une urgence viscérale.
Elle est à la fois la lame et la blessure vive avec « No Good For People », puis « Obsession » tourne en boucle comme une fièvre sensuelle, où chaque syllabe obsédante se lovant dans l’ombre du désir. Quand elle chante « Out of My Reach », c’est tout l’album qui semble osciller, funambule sur un fil de bruit et de silence.
« Reality » ronronne avant de mordre, ode à l’homosexualité, au sexe et au polyamour où l’amour s’étire en écho, tandis que « High Resolution Sadness » hurle : « Posez les écrans », comme si la vérité ne pouvait se voir qu’à l’œil nu. Enfin, « I See Your Pain » referme le poing : un miroir tendu à nos contradictions, où les héros vacillent, imparfaits, humains.
Authentique, brute, viscérale, tout le disque est traversé par une telle force d’âme qu’on le sent véritablement vivant. Abrasif et charnel, tendu comme un muscle en lutte, fragile comme une peau qui refuse l’armure. « You Heartbreaker, You » incarne et embrasse ce vacarme vital, dans une confrontation avec soi et avec l’époque…
Photo de couv. Johnny Hostile