[Interview]  VANESSA PHILIPPE “L’amour c’est chiant”

Le nouvel album de Vanessa Philippe, intitulé “L’amour c’est chiant”, s’inscrit dans la continuité d’une longue et belle discographie déjà riche de six albums. Un opus aux influences électro-pop 80′ qui explore les multiples facettes du désenchantement amoureux. Pleine de sensualité, de fantaisie, de douceur et d’énergie, Vanessa se révèle dans un dialogue intime où la pop touchante qui l’enveloppe reflète l’incarnation d’un nécessaire et sincère dialogue éperdument sentimental. Elle nous en livre ici quelques clefs. 

 

Après “Soudain les oiseaux” en 2022 tu reviens avec un sixième opus, “L’amour c’est chiant”. Pourrais tu revenir sur ce qui a déclenché la création de cet album ?
 
C’est le dernier clip que j’ai réalisé pour cet album “Soudain les oiseaux”, sur “Combien d’efforts”, qui a été le déclencheur. Le désenchantement amoureux, avec un second degré et une touche d’humour correspondait exactement à ce que j’avais besoin de développer à ce moment-là. Et puis dans certaines chroniques cet album était associé à une tendance années 80 rappelant Elli & Jacno, Lili Drop. J’ai donc écouté ces références que je ne connaissais pas, j’ai beaucoup aimé et j’avais très envie de développer cette tendance synté-pop années 80 qui me correspondait tout à fait !
 
Pourrais-tu nous parler de son élaboration ?
Comme pour tous mes albums, les chansons sont inspirées des émotions qui me traversent. C’était une période difficile pour moi, écrire et composer à ce moment là était vital. Je me suis mise à improviser à la maison avec ma guitare, sans objectifs particuliers sauf celui de me faire du bien, et très vite j’ai eu plusieurs chansons qui ont fait l’album.
 
Tu as convié Alba à œuvrer sur le titre “La dernière fois” ? Pourquoi Alba en particulier et comment avez-vous travaillé ensemble ?
Aba était venue me voir jouer, on s’est rencontré par l’intermédiaire de son label Sound & Vision avec qui je travaille aussi. C’est une artiste franco-mexicaine que j’aime beaucoup. Je voulais faire un album très années 80, électro-pop, coloré et dansant. J’étais sûre qu’elle comprendrait exactement ce que je voulais. Et je ne voulais pas attendre deux ans pour le sortir. Je lui ai donc proposé d’arranger et de réaliser mes chansons, elle a tout de suite accepté. Nous avons travaillé d’abord à distance par téléphone et échanges de mails, avec mes compos, mélodies, structure et accords, ses productions, puis on s’est vu en vrai. On a enregistré les titres chez elle en home studio et on s’est bien marrées !
 
Le tempo de cet album semble plus enjoué, est ce là une nécessité, une façon de nous montrer ton côté lumineux ? Y cherches-tu une forme de réconfort ou d’affirmation ?
Je les ai composées comme ça, avec un rythme enjoué pour la plupart. J’aime les contrastes. Mes mélodies et textes sont souvent mélancoliques, mais je pense que même si on parle de choses graves il vaut mieux en rire ! J’aime développer l’humour et l’autodérision avec mes images, ici je voulais en plus une musique rythmée qui donne envie de danser. Je ne suis pas du tout quelqu’un de triste dans la vie, je ris beaucoup. Alors j’ai besoin de montrer quelque part ce côté “clown triste” qui correspond à ce que je suis.
 
“Clair de lune”, “Beauté fatale”, “Au bord du ciel”, “Embrasse-moi” sont entre autres des titres plein de fantaisie poétique. C’est aussi une de tes facettes que tu dévoiles ? 
Je mets du second degré dans mes textes naturellement, par pudeur peut-être. Soit j’exagère le sentiment au maximum jusqu’à la dérision comme dans “L’amour c’est chiant” ou “Embrasse-moi” avec la répétition, soit j’utilise la métaphore comme dans “Au bord du ciel” ou “Clair de lune”. J’aime rêver et ça se ressent dans mes textes je pense. J’ai beaucoup lu Baudelaire “Les fleurs du mal”, ma toute première source d’inspiration.
 
Il y a dans tes chansons cette mélancolie habillée d’un romantisme franc, un peu désabusé parfois. Que voulais-tu transmettre le plus dans tes chansons ?
C’est vrai, je crois que j’ai besoin du sentiment amoureux sans détour et sans pathos parce que ce n’est pas le but. Je souhaiterai que les gens qui écoutent mes chansons se sentent réconfortés et apaisés. De la même manière ça me fait du bien d’écrire des chansons avec poésie et second degré quand ça ne va pas. Une forme de survie qui donne ce mélange de mélancolie et d’auto-dérision que je développe dans mes clips que je réalise.
 
Y a t’il eu une chanson plus difficile à écrire que les autres ? 
Même si elles sont venues naturellement sur cet album, surtout “L’amour c’est chiant”, il y a peut-être “Beauté fatale” qui est inspirée du livre de Mona Chollet et que je voulais écrire en hommage à toutes les femmes et que ce ne soit pas personnel du tout. Ce qui n’est pas un exercice facile quand on emploi le “Je” et qu’on écrit “Beauté fatale est-ce que sans toi j’me tire une balle”. J’ai bien essayé de modifier le texte mais je préfère garder la spontanéité de ce que j’avais fait avec les doubles lectures possibles. Pour “Jeanne”, en hommage à ma grand-mère, je lui donne aussi la parole, mais ce n’était pas évident de raconter de manière littérale une maltraitance qui s’étend au-delà de la mort. La première fois que je l’ai chanté sur scène j’ai failli pleurer dès le premier couplet.
 
Tu es une personne au multiple talent. La musique, la vidéo, la danse, tout cela semble nourrir ton inspiration. Serais-tu une artiste définitivement insatiable, infatigable ?
Disons que j’ai très envie de dire des choses et que c’est vital. Je suis d’un naturel assez timide et réservé. Du coup l’écriture, la danse m’ont beaucoup aidé à m’exprimer. Et aujourd’hui l’image, la mise en scène avec les clips ou les vidéos-danse, tout ça est devenu un terrain de jeu que j’adore et dont je ne peux plus me passer. Chaque chose en amène une autre et le tout me semble indissociable. 
 
Sur la pochette de ton album, tu te montre de profil avec ton visage et double juxtaposition entouré d’un décor ludique façon gaming vintage. Singulier autant que graphiquement accrocheur. C’est là une approche symbolique aussi peut-être que tu souhaites monter ? 
La pochette de l’album “L’amour c’est chiant” symbolise l’emprise avec la main sur la tête qui semble venir de quelqu’un d’autre, avec la question de l’identité sur ce double profil. Et puis ce personnage du jeu emblématique des années 80, Pac-Man, mange tout sur son passage. Encore une fois l’image est colorée, ludique et on peut ne pas y percevoir la douleur. C’est ça que je trouve beau.
 
Quels sont tes projets futurs ? La scène bientôt ?
Oui je souhaite jouer cet album et le partager avec le public le plus possible, du coup je me concentre sur les live. Je commence aussi le montage du prochain clip dont je viens de tourner les images.
 
 
 

 

“L’amour c’est chiant” (Le Poisson Spatial / Modulor) – 8/03/2024

 

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