Avec Party Time, leur premier album, les New-Yorkais de TVOD transforment le chaos nocturne en matière brute : une musique punk sans concessions, traversée par autant d’énergie festive que de blessures intimes. Enregistré à Montréal avec le duo de producteurs Félix Bélisle et Samuel Gemme, le disque capture l’urgence et la camaraderie d’un groupe qui joue comme il vit : à fond, entre humour décapant, lucidité désabusée et un goût prononcé pour le désordre créatif. Entre Brooklyn et Montréal, TVOD revendique une identité DIY farouche, des concerts bouillonnants et une vision très personnelle du post-punk, à la fois dansante, mélancolique et viscéralement honnête.
Votre album Party Time explore à la fois la fête et son côté sombre, l’isolement, l’addiction, les chagrins d’amour. Comment arrivez-vous à équilibrer ces émotions contrastées dans votre musique ?Je ne pense pas que nous essayions consciemment de les équilibrer, mais plutôt que cet équilibre se manifeste naturellement dans notre écriture, à travers nos expériences de vie. On ne peut pas atteindre ce niveau de “fête professionnelle” sans bien connaître ses démons.
Vous avez enregistré l’album au Gamma Studio à Montréal avec Félix Bélisle et Samuel Gemme. Comment cette collaboration a-t-elle façonné le son final de TVOD ?
Ce sont des gars géniaux. Ils ont joué un grand rôle dans la mise en forme de ces morceaux et ont permis d’en faire un album bien plus abouti que tout ce que nous aurions pu imaginer. Sam est un sorcier de la production et Félix ressemble à un savant fou, compositeur/gourou de la mélodie. Le fait qu’ils ne parlaient qu’en français était aussi un avantage : nous n’entendions jamais les saletés qu’ils pouvaient dire sur nous quand on n’arrivait pas à quelque chose ou qu’on faisait les idiots.
Entre vos premiers enregistrements en 4 pistes dans une cave et ce travail plus organique, quel a été le plus grand changement dans votre processus créatif ?
Probablement la confiance en ce que je fais et dans le processus lui-même. Un autre gros changement, c’est de ne plus me précipiter. Quand j’ai commencé à écrire, je balançais mes morceaux sur SoundCloud quelques heures à peine après les avoir créés. Maintenant, je comprends à quel point une chanson peut évoluer avec le temps. J’adore aussi les tester en live avant de les enregistrer, si c’est possible.
Votre musique mélange post-punk, egg punk et krautrock. Comment décririez-vous votre son à quelqu’un qui n’a jamais entendu TVOD ?
De la musique “post-gueule de bois classique” sur laquelle on peut danser et planer.
Il y a beaucoup de chaos émotionnel dans Party Time, est-ce que faire de la musique est une forme de thérapie pour vous ?
Oui, bien sûr. C’est ma façon préférée de m’exprimer et de documenter mon passage sur cette planète folle. La musique est un élan cosmique insensé qui domine ma vie aujourd’hui. Mais j’ai quand même un vrai thérapeute. Rien ne remplace ça.
Vous êtes basés à Brooklyn mais avez des liens forts avec Montréal. Comment ces deux scènes musicales influencent-elles votre identité artistique ?
Nous avons deux maisons. La maison de maman, c’est New York, car c’est elle qui nous a vus naître et qui prend soin de nous. Montréal, c’est clairement la maison de papa : on y va un peu moins souvent, mais on y fait bien plus ce qu’on veut. C’est là que se trouve notre label Mothland, et on essaie d’y aller aussi souvent que possible.
Quel morceau de l’album capture le mieux l’esprit du groupe, et pourquoi ?
Party Time serait probablement décrit comme l’hymne et le morceau-thème de l’album. Mais en ce moment, je ressens vraiment Uniform. J’ai toujours un faible pour la chanson la plus récente, celle qui va le plus dans la direction de ce que je veux écrire ensuite.
Vous décrivez la vie d’artiste DIY à New York comme à la fois sauvage et poétique. Qu’est-ce que cela signifie d’être un artiste indépendant à New York aujourd’hui ?
Je ne pense pas que ce soit facile d’être un artiste indépendant à New York aujourd’hui. Tu dois bosser dur pour pouvoir payer le loyer délirant et les frais de vie. Mais une fois que tu prends le coup, les amis que tu te fais ici et les moments que tu vis seront les meilleurs de toute ta vie. Mais oui : “Si tu réussis ici, tu réussiras partout.”
Votre musique est faite pour le live, pleine d’énergie et de chaos. Vous enchaînez les concerts à un rythme fou. Quelle importance les concerts ont-ils pour vous ?
C’est la raison pour laquelle on fait tout ça. Heureusement pour nous, on adore être des clowns sur scène, donc c’est vraiment un plaisir de le faire à cette intensité-là. Nos foies nous disent clairement d’arrêter, mais on s’en fout.
Et qu’est-ce que ça vous fait de voir des gens danser et sauter sur votre musique ?
C’est quand même beaucoup mieux que de rester assis avec ton pouce dans le cul et ton doigt dans le nez. Faut être dans l’instant.
Photo de couv. Kristin Sollecito