[Interview] NØNNE – 1er EP “Nothing’s Goin’ On”

Nønne, combo tourangeau, fondé par les membres de Grande et d’Éphèbe nous dévoile un 1er EP entêtant nommé “Nothing’s Goin’ On”. 5 titres qu’on écoute en boucle avec plaisir, à l’image d’un groupe qui ne semble pas s’imposer de limites et prouve avec un certain maestria qu’on peut faire une musique intelligente, dansante, variée, douce et électrique avec une vraie sensibilité, sans paraître, pour autant, trop « propre ». C’est Axel qui a accepté de répondre à mes questions pour en découvrir un peu plus sur ce groupe qui assurément fera parler de lui…

 
 
Comment est né votre groupe et pourquoi ce nom NØNNE ?
Les premiers morceaux ont vu le jour en 2019. À l’époque, je travaillais sur un autre projet avec un label qui me bloquait. J’étais déprimé et j’ai eu besoin de me faire plaisir. J’ai fait instinctivement ce que je savais et j’aimais faire : j’ai pris ma guitare, j’ai joué à toute vitesse et j’ai braillé en anglais. En 3 jours de travail, j’avais maquetté 8 morceaux. Certains sont d’ailleurs sur l’EP aujourd’hui. Je n’avais pas pour projet de les sortir, mais j’en étais hyper content. J’ai commencé à en parler à mes ami-e-s musicien-ne-s. On a mis vachement de temps à finaliser notre casting. On a commencé à répéter en 2021 et à l’été 2023, on était prêt pour la scène.
Dans mon esprit, j’ai vite appelé ça « NONE » (les copains trouvaient que « mon projet rock » c’était pas stylé). Je voulais signifier l’idée du vide qui me traversait à ce moment-là. J’ai finalement appelé le projet NONNE avec deux « N », ça permettait de franciser le nom et de faire un clin d’œil un peu marrant aux religieuses. On trouve ça drôle que des queeros comme nous adossent le rôle des bonnes sœurs (avec qui je m’entends très bien, en vérité. Love sur les bonnes sœurs).

Dans votre musique, vous mélangez punk rock, new-wave avec un zest d’électro-pop. Aviez-vous une ligne musicale directrice dès le départ du projet ?
La seule chose qui est vraiment claire, c’est que c’était un projet destiné au live. Je voulais revenir à l’instrument et complètement me libérer des ordinateurs. On s’autorise aussi à mélanger des influences assez diverses, mais toujours focalisées autour du rock anglo-saxon des années 80 aux années 2000. On propose des titres tintés de post-punk, de hardcore ou même d’indie-pop. La ligne directrice se construit parce qu’il y a une cohérence dans l’écriture, dans les choix des mélodies, les structures (très pops), les voix et surtout l’énergie… Mais on s’autorise des esthétiques qui peuvent être assez différentes.
 
Est-ce une façon de souligner que dans ce projet il y a quelque chose de plus instinctif et spontané que vous n’aviez pas forcément dans vos autres projets ?
En effet, lorsque j’ai commencé à composer pour NØNNE, c’était complètement cathartique : j’écrivais pour m’amuser, pour déverser des frustrations et de la colère. C’est la seule fois de ma vie où j’ai composé et finalisé la création d’autant de morceaux en si peu de temps. Je ne voulais pas me fixer de limites, réfléchir à comment ça allait être reçu. Je voulais éviter de me complexer. Donc oui, instinctif et spontané, ça définit très bien la démarche dans laquelle je suis avec ce projet !
 
Vous allez sortir votre 1er Ep le 17 mai. Avec qui avez-vous travaillé pour réaliser les 5 titres de ce disque ?Pour le record, la réalisation, les mixs et le master, nous avons travaillé avec Vincenzo de Marinis qui bosse notamment avec Eloi. On l’avait connu via le projet Chevalien qu’on adorait et sur lequel Annabelle, batteuse de NØNNE travaillait. Il est venu deux semaines à Tours, on a enregistré les batteries, basses et guitares dans un garage transformé en studio. Les voix et claviers ont été enregistrés au château du Plessis. C’est un lieu de résidence que je connais bien, les restes du tout premier château médiéval de la Loire. Il y a avait un lit à baldaquin dans la salle de mix et des costumes de théâtre au plafond de notre salle d’enregistrement. Plutôt classe.
 
La réalisation de ce disque est-ce un moyen pour vous de définir plus clairement votre univers musical ?
En effet, lorsque tu es en studio, tu ne te focalises pas autant sur l’énergie et l’interprétation qu’en live. Tu portes plus d’attention sur l’exécution et l’arrangement. Ça permet à certains morceaux de se muscler, de prendre corps, de préciser leurs identités. On s’est beaucoup amusé à soigner l’arrangement, notamment sur Calling. Personnellement, je travaille toujours mes chansons en studio avant de les amener sur scène. Je produis des maquettes qui sont déjà très avancées en terme d’arrangements. J’ai besoin de produire et finaliser la track pour savoir où je vais.
 
Au-delà de la musique, vos chansons expriment des choses avec force. Est-ce un moyen de mettre en avant votre côté militant et vos personnalités ? Quels sont les messages que vous souhaitez transmettre ?
Il a assez peu de chansons militantes de manière frontale. On n’a pas de texte qui dit « Nique le rassemblement national », même si ce serait pas mal d’en faire un. Par contre, on pose souvent un regard critique sur les choses, notamment avec More Pain, par exemple. Le texte évoque le masochisme dont font preuve celles et ceux qui cherchent à tout prix à gagner de l’argent dans un travail qui ne les épanouie pas, qui est basé sur la compétition. De manière générale, les textes sont assez radicaux, explicites, souvent violents. On manie des sujets qui touchent à la dépression, aux dépendances, au suicide… C’est comme si NØNNE était un peu l’endroit où je dépose sans trop y réfléchir certaines choses qui pèsent lourd sur mes épaules. Ça pourrait sembler romancé, mais finalement, c’est assez premier degré. No Box, par exemple, est une chanson sur le harcèlement qu’on peut subir lorsqu’on est à la marge, notamment lorsqu’on est queer. Pics est un morceau sur des nuits blanches que j’ai pu passer à ruminer dans un état second à cause des somnifères. Calling est une chanson bien plus lumineuse qui se veut fédératrice, un appel à se réunir pour célébrer la joie et l’amour. Il y a aussi beaucoup de morceaux qui ne sont pas sur l’EP et qu’on joue en live, qui sont assez forts dans leurs récits. Fuck, par exemple, est une chanson qui raconte une rencontre et une baise dans un backroom. Donc on a aussi des morceaux qui ne sont pas déprimants ! Mais on chantera toujours sur quelque-chose qui remue les tripes.
 
Quels sont les artistes/groupes que vous prenez pour modèle et avec qui vous sentez-vous le plus proche dans la nouvelle scène rock française ?
Alors nos modèles sont plutôt des groupes internationaux et ils sont très nombreux. Pour les gros noms : The Cure, Foals, Block Party, Placebo, Smashing Pumpkins… On est aussi très influencé par ce qui sort en ce moment (DIIV, Code Orange, Chappaqua Wrestling…). En France, de nombreux groupes nous plaisent beaucoup, mais sont assez éloignés de notre style. Je n’ai pas vraiment de modèle en tête. Personnellement, j’aime bien Rallye, je trouve leur proposition hyper classe et aussi très sincère. Je suis fan de longue date de Lysistrata, sinon. J’adore Carmen Sea aussi que j’ai vu en concert récemment et j’ai pris une énorme tarte. À Tours, il y a des groupes très intéressants. Les Stuffed Foxes sont déjà bien connus, mais je pense aussi à Marave, Gleam et Moonback Stage… En fait, la liste est immense, il y a beaucoup trop de groupes cools sur cette planète.
 
Parait-il que sur scène l’énergie de NØNNE est plus frontale et plus punk. Comment vivez-vous ces moments-là en live ?
Comme je disais le live, c’est notre objectif numéro un. On donne beaucoup sur scène, les chansons sont même parfois pensées pour le live. Quand j’écris, je m’imagine jouer sur scène. Les guitares sont stridentes, on braille plus qu’en studio, puis on essaie de ne pas trop avoir de temps mort. Il y a quelque chose de plus punk, oui, dans nos attitudes et dans la façon dont on donne corps aux chansons. C’est vraiment là que l’identité du groupe est la plus forte, je crois.
 
Quelles sont les prochaines dates ?
On fait notre release party à Tours le 31/05, puis on jouera à Paris au Supersonic le 07/06, au festival Melusik dans la Vienne le 08/06, au festival O’Tempo à Orléans le 25/08… Et de nouvelles dates se calent pour la rentrée. On a vraiment envie de jouer, de sortir un peu de notre région qu’on connait maintenant très bien, d’aller se défoncer sur les scènes de France et de Navarre.
 
 
 
 
 
 
 
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Photo de couv Aaron Benjamin