FEU ! CHATTERTON, TOUT EN HAUT DU ‘’BOXE’’-OFFICE !

Les cinq parisiens de Feu ! Chatterton, à l’approche de la trentaine, ne sont plus des perdreaux de l’année.

Formé en 2011, et fort de la maxime ‘’On n’a pas une seconde chance de faire une première bonne impression’’, le groupe avait sorti un premier album en 2015, ‘’Ici le jour s’est enseveli’’, couronné d’éloges mérités.

Nous avons piaffé d’impatience mais voilà que leur nouvel LP ‘’L’Oiseleur’’ vient de paraître et le groupe le défend sur scène. Exercice souvent périlleux car il s’agit de ne pas prendre le public averti musicalement pour des pigeons.

Mais exercice (à nouveau) brillamment réussi ici.

Un concert de Feu ! Chatterton est un voyage qui vous happe et vous transporte dans la pinède ou dans les airs. C’est une farandole des cinq sens en éveil qui cristallise les émotions, les ressentis et fait ressurgir des souvenirs personnels, moments d’amour, de tendresse, de ruptures, de mort, de nouveau départ. Une farandole faite de rencontres… Anna, Ophélie, Grace, Ginger, le ‘’capitaine couard’’ Francesco Schettino, ex-commandant du Côte Concorde, Juliette dans sa robe orangée…

Mais soudainement, à l’entame de ‘’La Fenêtre’’Arthur Teboul se meut en pugiliste, feignant la gestuelle d’un boxeur, terrassant des adversaires imaginaires, jouant à merveille de l’esquive rotative, aidé en cela par un jeu de jambes qui met en transe la salle, instinctif danseur.

S’il avait été un poids lourd, il aurait été Muhammad Ali plutôt que Joe Frazier ; poids moyen, il aurait été Sugar Ray Leonard plutôt que Marvin Hagler. Mais Arthur Teboul est un poids coq, alors il est Panama Al Brown, boxeur prodige et ange déchu de Cocteau, qui disait de lui qu’il était ‘’un poème à l’encre noire, un éloge de la force spirituelle qui l’emporte sur la force tout court’’.

Al Brown était un génie du noble art, les Feu ! Chatterton sont les chantres de l’art noble, entre rock, électro et poésie.

La silhouette déliée d’Arthur est une eau-forte de Dunoyer de Ségonzac sortie de ‘’Tableau de Boxe’’.

Gouailleur, titi parisien sorti d’un roman de Maupassant, le dandy charismatique à la verve poétique a du relief.

Presque frêle, gracieux dans ses déhanchements, virevoltant, haranguant le public au balcon depuis le ring du Bataclan : ‘’Vous qui êtes dans les branches, dans les cîmes, vous pouvez encore aller plus haut’’.

Et voilà que le groupe, déployant son envergure, joue les premières notes de ‘’Boeing Boeing’’Arthur au milieu, bel albatros majestueux volant à tire-d’aile au-dessus de Giglio ou de Sari d’Orcino.

‘’L’ivresse’’, ‘’Grace’’ ou ‘’Ginger’’ alternent les moments de quiétude et d’autres fougueux et rugissants. Tel le combattant haletant qui a besoin de reprendre son souffle avant de balancer des droites en piston pour faire baisser la garde, puis une série de jabs plus appuyés et l’uppercut rageur et ultime qui nous mettra K.O.

Dans cette dramaturgie tour à tour sereine et sauvage, le chant d’Arthur, les riffs de guitare et les synthés Roland TB 303 et l’analogique monophonique SH-101 de ClémentStéphane et Antoine, ainsi que la batterie omniprésente de Raphaël se répondent avec une alacrité singulière.

En musique comme en boxe, ‘’le talent est comme l’or, il n’a pas besoin de soleil pour briller’’.