“Doctor Strange in the Multiverse of Madness” de Sam Raimi. People are strange.

Alors, il y a un docteur beau gosse, il est invité au mariage de son ex, il est bien dégouté et il boit du vin grâce à ses pouvoirs car c’est un magicien, pas un viticulteur. Il est en terrasse, il a le seum, et BIM, il y a une étoile de mer géante qui débarque pour foutre le dawa dans la rue. Le docteur, il saute par la fenêtre, il sauve une nana qu’il a déjà vu en rêve. Elle lui dit que ce n’était pas un rêve, il ne comprend rien et nous non plus. Là, il y a un chinois en surpoids qui balance des lassos de feu, il y a la musique de “Batman” et le docteur, il défonce le monstre. Après, il apprend qu’il y a plusieurs univers en plus du sien, le Multivers, et que la fille peut les traverser mais pas ses mamans lesbiennes. Alors, le docteur, il sent qu’il y a quelque chose derrière tout ça et que la Sorcière Rouge, elle peut protéger la fille mais, en fin de compte, c’est une menteuse et elle va déconner sévère. Bon, ils se parlent mal et la Sorcière veut aller dans d’autres Mondes pour garder ses deux enfants qu’elle n’a pas dans la vraie vie. Là, ça commence à être un sacré bordel à l’écran et dans le public, même si on n’était que sept dans la salle. Alors, le docteur, il dit à ses potes sorciers : “on va la défoncer, la méchante !” mais, non, elle est trop balèze, elle marave tout le monde et elle arrive à poursuivre le docteur et la fille dans des décors bizarres. A travers un chemin féérique. On les voit même en dessin-animé. En fait, la sorcière rousse super jolie, elle existe dans un autre Monde avec ses enfants et elle veut posséder l’esprit de son autre Moi. Là, il y a un vrai malaise dans la salle de cinoche. Bon, le docteur il rencontre le club des 5 qui lui explique que son autre Moi à lui est mort et qu’il doit se démerder. Le docteur, il pense que le vin était trop fort et qu’il y avait de la beuh dans son thé. C’est pour ça qu’il est perdu. Et nous aussi. Mais, heureusement, il y a de l’action. Alors, il se bastonne avec la Sorcière mais trop tard elle a tué le club des 5 et tous les copains du docteur mort. Bon, là, j’ai pensé à mon repas du soir pendant les combats, j’avoue. C’était trop ché-per. Et bien, ce n’était pas fini et là, j’ai trop gol-ri. Le docteur fait revivre un cadavre de lui qui s’est fait laminer après le générique du début, il met une cape qui est faite en squelettes mais des squelettes vivants-j ‘étais choqué- et il remet de l’ordre dans l’autre monde et le sien, de monde. La sorcière se parle à son double en tant que maman, et la maman dit : “Ce n’est pas bien. Tu fais peur aux petits frères !” et là, la Sorcière Rouge, elle comprend et elle fout la paix à toute la smala en s’enterrant toute seule avec des grosses pierres. Le docteur, il a toujours le démon car il a vu une version différente de son ex dans le New-York où tout est à l’envers, mais ce n’est pas alarmant et il se dit : “tant pis”. Le Chinois rigolo et lui, ils sont bons copains. Pas la peine d’être amoureux. Ils rentrent chez eux. A la fin, le docteur tombe par terre en entendant un solo de guitare électrique et c’est encore plus le délire. Après le générique, il y a la meuf des parfums qui coupe l’écran en deux, il y a les noms qui défilent et après, il y a un mec qui vend des saucisses avec du pain au lait, qui se met des baffes et qui dit que : “c’est fini” et que nous aussi, en fait, on a envie de se mettre des baffes.
 
John Wook de la Terre 7207.
 
 
 
Neuf ans sans nouvelles de l’Ami Raimi sur le grand écran et un peu moins sur le petit. C’est dire avec quelle impatience j’attendais le second volet du Sorcier Suprême réalisé par le papa de la trilogie “Spider-Man” !
Elégance de la réalisation, casting inoubliable, scènes-cultes, les deux premiers épisodes de l’étonnant monte-en-l’air prouvaient que l’on pouvait développer un divertissement de qualité sans perdre une once d’authenticité.
Tim Burton secoua Hollywood en 1989 avec un Homme-chauve-souris sur fond d’hommage à la série télévisée ? Sam Raimi insuffla à l’Homme -araignée une “vérité” teintée de romance, loin des extravagances du cinéaste susnommé.
Même goût pour le fantastique baroque, même investissement pour la firme aux grandes oreilles (“Dumbo” pour l’un, “Le monde fantastique d’Oz” pour l’autre), les deux hommes se partagent, certes, les mêmes malles au trésor mais pas les mêmes jouets.
Et quand Tim se complait dans le gothique, Sam tutoie Romero et Juliette.
Retour, donc, à la case départ pour l’Oncle Sam avec ce nouveau Doctor Strange nimbé de mysticisme mais aussi d’horreur et de folie. 
Le premier volet développait la genèse d’un chirurgien hautain en voie de transformation et d’acceptation de soi.
Le second allait tailler dans le lard et nous tétaniser de peur, du moins, c’est ce que laisser entendre l’usine MARVEL.
Attention ! Les enfants regardent ?
A l’arrivée, mon avis est mitigé.
 
 
 
La virtuosité de Sam Raimi en matière de réalisation reste intacte et ce dernier s’amuse à truffer son “Doctor Strange in the Mutiverse of Madness” d’autocitations savoureuses. Ici, un travelling avant vers une pupille dilatée entrevu dans “Darkman”; un globe oculaire catapulté et un livre maléfique aperçus dans “Evil Dead 2” et là un caméo porte-bonheur en la personne de Bruce Campbell, fidèle parmi les fidèles. Clin d’œil. Notre inoubliable Ash dans la trilogie démoniaque culte, et l’estimable série TV qui en découla, connait, lui aussi, les affres des vortex trompeurs et sa présence n’en est que plus savoureuse !
La photographie de John Mathieson (“Gladiator” et “Hannibal” de Ridley Scott) est chaleureuse et nous enveloppe d’une douce lumière, évoquant le travail de Don Burgess.
Le casting de la précédente mouture demeure le sel de ces retrouvailles (Benedict Cumberbatch et Elisabeth Olsen sont, à l’évidence, complémentaires) et du point de vue scénaristique, l’incursion du personnage de la Sorcière Rouge (et des enjeux de la série “Wanda Vision”) s’effectue sans forceps.
Schizophrénie, réalité altérée, trou temporel, le scénariste Michael Waldron empile les strates narratives issues de “Spider-Man : No way Home”, de la série “Loki”, du diptyque ” Infinity War”-” End Game” et de l’effervescent “Spider Man New Generation” de manière savante.
Bref, tout s’imbrique…mais ne casse pas trois briques. Je m’explique.
 
Slalomer entre différents univers, les rattacher les uns aux autres, établir des connexions entre différents personnages sans que l’ensemble paraisse gratuit ou vain est un tour de passe-passe des plus périlleux. Lorsque l’illusion est parfaite, le tour est joué.
De ce point de vue, ce “Doctor Strange” tient ses promesses.
Mais c’est dans la sève de ce scénario maigrelet que je ne me retrouve pas. On comprend, assez rapidement, les rouages qui sont employés dans ce Multiverse où tout est possible mais où rien n’est exploité. Cette histoire de possession/pardon/course contre la montre n’est autre qu’un alibi pour des combats redondants (cette étoile de mer pillée chez “Suicide Squad” de James Gunn) et des twists poussifs (cette révélation d’une mutante capable de maitriser ses pouvoirs in extremis : une blague). Sam Raimi est étouffé par un cahier des charges proéminent. Ses excès de fièvre sont endigués par des suppôts (sitoires) de Satan au doux nom de Rapetou et d’Oncle Picsou. Parfois, au détour d’une scène poétique (l’attaque des notes) ou d’une image marquante (la cape constituée de squelettes dignes de “Jason et les Argonautes”), l’on sent les velléités d’un auteur animé des meilleures intentions : celles de nous incommoder.
Mais non. Disney est le plus abominable des monstres. Il vampirise ce projet, l’aplanie, l’enrobe d’un vernis épais et le jette en pâture à une audience adolescente jugée peu regardante.
Vous fantasmiez les recoins cachés d’un Monde-Double et de ses possibilités infinies ? Vous aurez droit à une minute de plans psychédéliques, pas plus. Steve Ditko et Stan Lee doivent se retourner dans leurs tombes.
Au final, cet opus ne vaut que pour l’emploi d’un éternel teenager surdoué. Ses mouvements de caméra, son amour pour le 7ème Art (“Un plan simple” ou “Jusqu’en Enfer” sont des exemples à étudier dans toutes les écoles de cinéma) et sa malice imprègnent chacun de ses longs-métrages.
Y compris son dernier.
Dommage qu’une major timorée fasse si peu confiance à l’intelligence de son public et confonde encore liberté artistique et laisse extensible.
 
John Book de la Terre 616.
 
 
 

Crédit photo : Marvel Studios