CROCODILE BOOGIE – STORY OF “A FAMILY AFFAIR”

CROCODILE BOOGIE aka SEB BLANCHAIS dégaine des deux mains un premier album “A FAMILY AFFAIR”. Avec le mordant qu’on lui connaît, il a su s’entourer d’une belle bande de reptile à sang chaud !
10 titres exigeants, sans concessions, où la volonté de donner naissance à cette organisation de bienfaiteur (de bon fêtard aussi) ne se cache pas derrière des faux semblants. Le plaisir n’en est que plus grand, et le lâché prise, frontal, que plus bénéfique.
Seb nous parle de cette folle aventure qui nous prouve, s’il est encore utile, que derrière la bête se cache bien un cœur de crocodile…

D’où t’est venue l’idée de sortir cet album ?
J’avais des morceaux dans la tête qui n’étaient pas toujours dans l’ADN du groupe avec lequel je joue (Head On)., le genre de son qu’on jouait avec les Dead Horse Problem, avec Tonio Marinescu et Régis Camilleri. Le groupe n’existe plus désormais mais j’ai toujours dans la tête des morceaux ou des reprises qui traînent.

J’avais envie de faire autre chose. C’est venu comme ça… L’idée n’était pas de monter un groupe au départ mais plutôt d’enregistrer pour se marrer ; c’était plus une sorte de plaisanterie. Avec l’accumulation des morceaux, c’est finalement devenu un album, avec maintenant une vraie envie de le jouer live.

On est en train de bosser dessus avec Gil Riot et Jibé Dem. Nous avons commencé le projet dans le Studio Suppa Soup de Jibé à Saint-Senoux [à 30km au sud de Rennes]. Je me suis dit qu’on n’allait pas faire venir les Australiens pour jouer avec nous, donc j’ai fait le pari de jouer avec de très jeunes zicos canadiens tout juste installé en France , Pialli à la batterie qui va jouer debout avec un kick sous sa caisse claire et sa sœur Stella qui sera à la basse. ( elles ont leur propre groupe NOBLE SAUVAGE avec une autre frangine aux percus et leur papa à la gratte , une autre “ family affair”…

On s’est dit qu’on ne se prendrait pas la tête. Je voulais essayer ça d’abord. J’avais des plans B, des plans C, des plans D… Je connais pas mal de musiciens mais je voulais vraiment jouer avec ces quatre-là, mecs et nanas, des jeunes et des plus vieux.

C’est plus difficile pour les groupes de cinquantenaires en France : on n’a pas eu le choix de jouer avec des gens plus vieux que nous parce qu’il n’y avait pas de rock avant.

Ce que j’aime a contrario en Australie, c’est que tout le monde joue ensemble ; on a tous à s’apprendre des uns des autres. À 60 ans, Spencer P. Jones jouait avec un guitariste de 20 ans et quelques quarantenaires. Là c’est pareil, il y a des filles qui doivent avoir entre 22 et 28 ans, Jibé qui a la trentaine bien tassée maintenant, moi qui en ai 50 et Gil un peu plus.

A partir du moment où on a le même projet, il y a des idées, une autre façon de jouer, de la cohésion, et je trouve ça vraiment chouette. Je suis vraiment content du résultat après quelques répétitions. J’espère que la COVID va nous lâcher et qu’on pourra jouer les morceaux sur scène.

CROCODILE BOOGIE “A FAMILY AFFAIR” Label Beast records 2020

Le projet a-t-il pris forme justement pendant la période de confinement ?
Non, tous les morceaux étaient déjà enregistrés. C’était à l’époque où les Australiens passaient souvent. J’avais des trucs en tête et le lendemain je leur disais « Avant que vous vous cassiez à l’aéroport pour rentrer chez vous, ça vous dirait de jouer rapidos si Jibé est d’accord ? ». Parfois ça collait, parfois ça n’était pas possible. C’est pour ça que c’est un album hyper spontané : il y a le micro, les instruments, la prod… On a tout fait ensemble, c’était tout direct.

Le prochain album sera différent. Ce sera vraiment un groupe avec lequel je joue, sans doute y aura-t-il des invités.

Pendant le premier confinement, je pense avoir déjà écrit le deuxième album, qu’on va aborder petit à petit en live. Ça s’est fait pendant une période d’ennui, comme tout le monde. Je pense que ce sont les seuls moments où tu peux vraiment écrire correctement, quand tu ne vas pas bien. En tout cas, c’est mon cas. C’est le moment de se sortir les tripes et de coucher ça sur le papier. Il y a souvent des choses qui sont trop fortes en émotions, que tu corriges après, mais tu arrives à faire quelque chose de bien et d’honnête.

C’est Spencer P. Jones, mon idole, qui disait toujours : « Oh la la, les gens, quelle chance ils ont de faire des dépressions ! ».

Il faut une période d’au moins 5 à 6 semaines un peu basses pour pouvoir prendre ce qu’il y a de bien dedans ; c’est souvent hyper créatif.

On ne peut pas créer réellement quand on est heureux ?
Sauf si tu veux faire du Elmer Food Beat, ça c’est autre chose !

Et comment s’est passée la composition avec les différents participants, notamment sur les reprises ?
Il y a deux reprises que j’avais faites avec Dimitri Kucharzweski et Jo Brockman des Midnight Scavengers, le dernier groupe de Tonio. Je les avais déjà jouées, mais on ne les avait pas enregistrées avec les Dead Horse Problem en studio. Elles existaient déjà en live pendant des années avec Tonio, Régis, etc. et c’était hyper sympa de rendre hommage à Tonio, et ça va avoir du sens que ce soient eux qui les jouent, puisque c’était le dernier groupe dans lequel Tonio a joué après les Dead Horse.

Ça s’est fait comme ça. C’est moitié reprises, moitié compos, ce qu’ont été pendant 30 ans les albums de country. Avec 10/12 minutes par face, comme les albums de Johnny Cash ou Waylon Jennings, dont je suis fan, il y avait 4/5 reprises, 4/5 compos, et j’aime bien l’équilibre de ce truc-là. Parfois, on se perd dans des albums trop longs lorsqu’il y a trop de compos. Je suis vraiment fan du 10 titres : ce sont des albums concept. Les doubles albums robotiques, longs, avec toutes les boucles, etc. il faut avoir vraiment beaucoup de choses à dire quand même. Il y a beaucoup de musiciens qui ont eu la prétention de le croire. Les Black Angels, c’était il y a 20 ans que ça a démarré, c’était génial, mais il y a eu trop de gens à les suivre à les copier. CAN c’étaient des génies, maintenant être, un « sous-quelque chose », ça n’a pas beaucoup d’intérêt.

Il y a aussi une notion sur ton album, comme son nom l’indique d’ailleurs, c’est le côté amical.
Complètement. Si j’avais fait un double album, j’aurais mis les autres potes, mais l’idée-là était d’en réunir.

Il y a des morceaux qui n’ont pas fini d’être mixés. Le prochain album sera mixé par un Australien avec qui nous avions bossé sur les deux derniers Head On. Il y a un titre enregistré avec Ben Salter, qui est un énorme artiste en Australie ; on a fait une reprise, un gospel. On a fait un duo que j’avais composé avec Susy Sapphire et Pete Ross. Pete voulait le mixer. Je lui ai dit que j’avais déjà 10 titres, que je mettrai celui-ci sur le prochain ; et il le mixera puisqu’il avait envie de le faire.

Ça s’est vraiment fait avec des potes, les reprises aussi. La reprise de « Comfort of the Devil »des Dogs D’Amour [sur l’album « A Graveyard Of Empty Bottles (Vol. 1) », 1989], c’est toute une période. Quand j’avais 25/30 ans, avec Fred “Brian” Loret, on descendait des bières, on allait draguer toutes les meufs qu’il y avait en ville, on faisait les cons. Ces gens sont tous décédés aujourd’hui parce qu’ils avaient une vie un peu rock’n’roll… Tout le monde était sous dope… C’était une façon de leur rendre hommage, c’est toujours un disque que j’écoute. Abel Souaidi avant qu’il ne se foute en l’air, m’a redonné un 25 que j’avais déjà. Je lui ai dit « ben non, ça fait chier de revendre ces trucs-là, garde-le », c’était dans l’ordre des choses je m’en suis douté. Et le lendemain, on enregistrait et avec Jibé, je me suis dit que ce morceau collait avec ce que j’avais envie de faire, et ça s’est fait comme ça.

Les reprises sont dans ce truc-là. « This Town » – c’est un morceau de Johnny Cash que peu de gens connaissent ; elle figure sur la B.O. du film « I walk the Line » [titre français : Le pays de la violence] réalisé par John Frankenheimer, avec Gregory Peck et Tuesday Weld. Maintenant le titre fait tout de suite référence à Johnny Cash, alors que c’est un film de 1970, très bizarre.

Je suis originaire de Fougères, une ville que je n’aimais pas. Comme le chantait Cash : « This town is not for me / I won’t be stayin’ ’round / This town is hard and cold / I’m not happy in this town », il fallait la quitter très vite, parce qu’à part se battre ou vendre de la dope, il n’y avait rien à y faire.

C’était là que passait la route vers Rennes, c’était la ville du chômage, il n’y avait même pas de gare, c’était une ville triste. J’ai quand même beaucoup rigolé à cette période mais à un moment donné, j’ai eu besoin d’autre chose. Je n’y suis jamais retourné depuis.

C’est pour ça que j’ai repris ce morceau-là. J’ai du mal à chanter des chansons qu’on survole. Si en plus l’émotion n’est pas là, ça ne peut pas fonctionner.

C’est un album qui parle beaucoup plus du cœur ?
Il y a plein d’autres morceaux, c’est bien aussi de mélanger des compos et d’arriver avec une cohérence sans faire un détour dans l’introspection, si on peut dire ça… Je n’aime pas trop les grands mots…

Mais s’il y a une notion intime, tu sembles quand même enjoué sur cet album ? Il y a une certaine ampleur festive, même sur des titres plutôt « down » ?
J’ai mis du temps à vouloir sortir l’album… Jibé, Gil Riot et Goulven Hamel m’ont vachement poussé. Goulven l’a écouté et m’a dit « Putain, ça sonne vachement bien, on va le faire ! ». J’ai accéléré la démarche dès ce moment-là. Je suis assez enjoué avec cette démarche et d’en faire quelque chose. Le disque va sortir plus tard, on va vraiment travailler, on va avoir le temps visiblement, mais c’était comme une petite étincelle ce truc-là, qui fonctionne.

Franchement, j’avais beaucoup d’appréhension. Si je n’en avais vendu qu’à des potes, ça m’aurait quand même fait un peu chier. Les Australiens ont proposé de le distribuer et ça a commencé à partir là-bas … A part les Druids Of The Gué Charrette et mon album, il ne doit y avoir que trois disques de groupes français là-bas. Il y a une distribution aux Etats Unis, ils m’en ont pris 30 d’un coup après que je leur ai envoyé le clip ; je me suis dit que si ça fonctionne… C’est quand même difficile. J’ai toujours détesté les gens qui ont le melon. Parfois ton égo devrait te servir à avancer, mais parfois c’est dur à percevoir, mais quand même c’est positif, ça fonctionne.

Ton appréhension, elle n’est pas légitime en réalité car comme tu le disais tout à l’heure, tu faisais les choses parce que tu avais envie de les faire, que tu as eu le déclic pour les faire.
Peut-être parce que c’est la première fois que je fais un truc seul, sans un groupe autour…

En même temps, l’album n’est pas sous ton nom ?
C’est une démarche différente.

Parce que c’est plus intime ?
Certainement pour cette raison oui. Je ne suis pas quelqu’un qui se dévoile. J’avais l’impression de me foutre un peu à poil avec ce projet…

C’est bien du coup. Comme quoi on est bien « à poil » aussi (rires). Tu disais tout à l’heure que ce premier album, parce qu’il y en a un autre qui suivra, n’est pas d’hier. Depuis combien de temps l’avais-tu en tête ?
Quand j’ai arrêté les Dead Horse, il y avait des morceaux que je voulais faire, qu’on n’avait jamais joués sur scène; certains d’entre eux sont sur Head On. J’emmenais des morceaux plutôt country qu’on mettait en fin d’album, des trucs que j’avais envie de faire. C’était il y a 15 ou 20 ans… Mais j’ai toujours eu ce side-project en tête… Mélanger de la country et du rockabilly, comme on le faisait à l’époque avec Orville Brody avant son départ pour Melbourne. J’aime vraiment les choses australiennes pour ce qu’elles sont et j’avais besoin de ce truc.

C’est cette forme d’ouverture à la musique que tu fais vivre ?
Je pense oui, ce sont des trucs que j’aime.

Ça a mûri depuis la première idée j’imagine ?
Ah oui ! Là, je vois à peu près ce que je veux faire. Ça mûrit toujours la musique, c’est un vrai partage ; c’est complètement différent que de jouer avec son groupe… De ramener ces deux petites canadiennes qui vont apporter une autre façon de jouer… Une femme apporte toujours une autre vision. Je vois mieux comment on va aborder les autres morceaux ; tu te demandes si tu vas en faire un boogie ou un slide plus lancinant, et puis finalement, ça va plutôt être tel ou tel choix, parce qu’il y a ces gens avec toi…

S’adapter aux gens avec lesquels tu bosses, c’est ça l’idée ?
Oui, il y a une devise que j’aime bien, c’est « essaie, et tu sauras ». Il y a parfois des gens avec qui tu collabores, parce qu’il y a de la timidité ou de la retenue, qui te disent « Je ne pense pas que ce soit une bonne idée, laisse tomber ». Mais si ! Tu peux prendre 20 minutes, ce n’est pas une perte de temps. Le temps est précieux. Nous par exemple, on répète le lundi… J’ai à moitié la tête dans le cul parce que je n’ai que le dimanche pour récupérer. Gil termine son boulot après souvent quelques concerts pendant le week-end. Les deux nanas n’ont pas trop de thunes, elles sont à 80 bornes, 1h aller, 1h retour… on a 2 heures en tout et pour tout pour répéter. Et moi, il faut que je m’occupe de mon gosse pour que ma femme prépare ses cours pour la semaine… C’est la course tout le temps. On essaie de rentabiliser le temps. Mais ça n’empêche pas le fait qu’on a toujours le temps de s’écouter et de s’entendre. On a aussi la chance de pouvoir le faire avec des gens ouverts.
Au début des compos, je voulais jouer de la gratte (je joue très mal) et je pensais pouvoir faire des accords ouverts, majeurs, et mettre la voix dessus. Alors que si je joue avec Gil qui te dit « J’aime les morceaux », lui est capable de te faire les arrangements de quatre morceaux en une répétition alors que moi, j’ai besoin de quatre répètes pour un morceau ! Ce qui fait que ça va très très vite. On n’a quasiment jamais joué et on a mis du temps à sortir les enregistrements. Les prises ont été faites en live, ça été fait comme ça, en une prise, on n’a rien changé. On a dû faire environ six répètes ; après, il y a eu des ajouts, mais le nerf des morceaux a été fait grâce à Gil et Jibé.
Gil est un très bon musicien, avec une vraie polyvalence ; il aurait pu être, et je lui souhaite toujours, un grand musicien de studio. Il sait aussi y mettre de l’âme, contrairement à d’autres.

Sur l’album, il y a tes amis, Beast Records, ta famille. Notamment ton fils Jim sur la pochette. Il y a cette notion de transmission ? Comment tu l’expliques ?
Je ne sais pas si Jim fera de la musique… Je lui ai fait dessiner des crocos qui figurent au dos de la pochette…

Après un morceau de Billie Holiday qui traite plus d’un mac que d’autre chose, je l’ai réadapté en mettant 2/3 trucs en plus, parce que ça pouvait fonctionner sur autre chose. J’aime bien piquer les choses chez les gens que j’aime en général. C’est pour ça que j’ai fait appel aux frangines, assez inexpérimentées, plutôt qu’à des gens expérimentés.

C’est l’envie qui m’intéresse avant toute chose. Les gens qui n’ont pas l’envie, qui chantent comme des Castafiore, je ne vois pas trop l’intérêt. L’envie, tu peux l’avoir jusqu’à 70 ans ou plus.   

Je me souviens d’un festival à Memphis. La première fois où j’y suis allé, je pensais que c’était un grand festival en plein air, mais que dalle ! Tu as 45 personnes qui jouent pendant 10 heures. Et là, je vois un mec qui jouait avec une Gibson Flying V. Il y en avait un autre, avec sa gratte dans le dos, qui le regardait jouer, puis qui se casse, genre je vais descendre 2/3 bières dans le troquet d’à-côté, c’était le type qui était en train de reprendre les plans d’un type d’au moins 70 piges que je venais d’entendre, qui refaisait ce que je venais d’entendre.

C’est quoi l’envie ? Et l’envie n’est jamais démonstrative ni lucrative, c’est comme ça. Il y a des gens comme moi qui font de la musique ni pour l’égo, ni pour la gloire, ni pour la thune mais parce que c’est indispensable…

Beaucoup d’Australiens te disent « qu’il faut que tu t’arrêtes quand tu n’as plus rien à dire. Il ne faut surtout pas essayer de continuer ; tu t’arrêtes, et puis ça reviendra. Ou pas ». Mais quand tu as toujours des morceaux dans la tête, tu es obligé d’essayer de les faire arriver, sur un CD, sur un vinyle, sur une démo, même pour toi ; mais il faut que ça s’arrête d’être là, il faut que ça aille ailleurs, que ça existe. Même si tu n’es pas obligé de le commercialiser, tu dois en faire quelque chose, un peu comme un dessin.

La photo avec ton fils sur la pochette… Peux-tu me raconter comment ça s’est fait ?
C’est Jean-Yves Gargadennec, qui est un très grand photographe, qui l’a prise. Le mec a commencé ses photos avec les Witcherry Wild quand j’avais la vingtaine. Il a gagné un grand nombre de récompenses. Il m’a demandé un jour s’il pouvait faire des photos de Head On, des portraits, etc… En ce moment, il bosse pour la Région Corse. Il m’a dit « Mets ton gosse sur tes genoux », il a fait une photo en argentique. Ça s’est fait comme ça, simplement.

Mais c’est un peu l’histoire de cet album : des centaines de bières descendues, des cendars remplis, des bouteilles à écluser, des conneries à raconter… Pendant que j’étais en train d’enregistrer, il y avait mon môme qui jouait dans l’herbe. Ça s’est souvent fait comme ça, des dimanches en rentrant tard, en faisant les devoirs à la va-vite. Ça s’est fait comme ça quoi.

Écouter CROCODILE BOOGIE “Familly Affair” : https://beastrecords.bandcamp.com/album/crocodile-boogie-a-family-affair-br305
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Stef’Azak / AnMa / Alechinsky
Photo de couv. Noémie Perraux