Après quinze années de silence discographique, Stereolab signe avec « Instant Holograms on Metal Film » un retour lumineux, réaffirmant la singularité de sa démarche musicale et artistique. Ce onzième album studio, paru en mai 2025, souligne l’ADN d’un groupe qui poursuit son chemin mélodique entre pop expérimentale, engagement politique et fascination pour les utopies modernistes.
Fondé en 1990 par Tim Gane et Lætitia Sadier, Stereolab s’est très tôt démarqué par son hybridation radicale des genres. Nourri de krautrock allemand, de pop yéyé française, de jazz modal, de bossa nova et de musique concrète, le groupe a tissé, album après album, une trame sonore unique, à la fois rétro-futuriste et profondément ancrée dans les problématiques de son temps. Leur œuvre, oscillant entre abstraction sonore et clarté mélodique, est toujours portée par une conscience politique aiguë : dénonciation du capitalisme, réflexion sur les structures sociales, emprunts aux penseurs critiques tels que Marx, Debord, Deleuze ou Guattari.
Après une pause entamée en 2009 et ponctuée par une série de rééditions saluées par la critique, Stereolab revient aujourd’hui interroger la lumière du printemps 2025.
Quelque chose de scientifique, de radieux, d’humain et d’infiniment poétique, de l’ordre de la magie indélébile brille toujours dans les cerveaux popy de Stereolab. Sublime, subtile et surtout fidèle à leur discographie, les membres de Stereolab, toujours emmenés par le duo fondateur, Tim Gane et Lætitia Sadier mêlent dans cet album nouvelles compositions élégantes et collaborations épatantes (notamment avec Cooper Crain, Ben LaMar Gay ou encore Marie Merlet), enrichissant leur palette sonore.
« L’idée d’un nouvel album a émergé au printemps-été 2023. Nous avons commencé à enregistrer en janvier 2024, sans répétitions, comme toujours. Nous sommes repartis de zéro. Je me considère encore comme un débutant : je me laisse guider par l’instinct. La musique reste une aventure excitante, sans crainte de la partager. Ce qui vient, vient. » explique Tim Gane
Le groupe pose les bases d’une esthétique familière et pourtant subtilement renouvelée : textures analogiques, boucles hypnotiques, nappes de claviers vintage, percussions métronomiques avec des éléments qui se greffent avec surprises dans une rythmique drum and bass sur certains titres, un disco-jazz éclaire d’autres, tandis que des plages plus expérimentales flirtent parfois avec le minimalisme.
« Je perçois tout comme un flux continu, sans frontières nettes entre passé et futur. Si Tim est le principal compositeur de Stereolab, j’ai cette fois apporté bien plus de matière musicale. Mon expérience en solo ces dernières années a enrichi le son global et influencé l’orientation de l’album. » souligne Lætitia Sadier
La voix de Lætitia Sadier, toujours aussi limpide et délicate, reste le fil conducteur du voyage. Elle y déploie une poésie critique, toujours empreinte d’un calme imperturbable, même lorsqu’elle évoque la crise écologique, la manipulation médiatique « Colour Television » ou les illusions du progrès « If You Remember I Forgot How to Dream Pt. 1« . Les textes, en anglais et en français, révèlent un regard lucide sur le monde contemporain.
La pensée, chez Stereolab, circule, elle s’infiltre dans les structures rythmiques, dans les arrangements, dans l’alternance entre instru et chant, dans les ruptures et reprises en invitant par une écoute attentive, à un éveil des sens et de l’esprit.
Le pari de Instant Holograms on Metal Film réside dans sa capacité à faire du neuf avec une matière sonore profondément liée à l’histoire du groupe. Mais ici, rien n’est vraiment comme avant, chaque morceau est l’héritage d’un long travail esthétique et nourri par une vitalité plus que jamais contemporaine.
Le son, sensuel, radieux et charmeur, bénéficie d’une production irréprochable, en grande partie assurée par Tim Gane, qui respecte les textures organiques des instruments tout en laissant place à des agencements électroniques très actuels.
« Instant Holograms on Metal Film » c’est la réaffirmation d’un groupe qui, en approfondissant sans relâche son vocabulaire, célèbre une pop scintillante qui pense.
Stereolab, groupe au statut culte, reprend ici la parole avec force, douceur et intensité. Leur musique continue d’ouvrir de nouveaux espaces.
Prochaines dates françaises :
03.06 – Stereolux – Nantes
04.06 – Le Trianon – Paris
05.06 – Rock School Barbey – Bordeaux
09.06 – La Belle Electrique – Grenoble
Photo de couv. (c) Joe Dilworth